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Pour bien comprendre autrui ?

Publié le 10/08/2014

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Appréciations d'ensemble et remarques

Excellente réflexion, combinant avec harmonie la rigueur de l'analyse et un certain élan de la sensibilité. Le candi­dat pose le problème avec netteté, puis choisit d'opposer les deux modes d'aperception d'autrui qui lui semblent essentiels : l'intelligence (raisonnante, discursive, indi­recte) et l'intuition (sympathique, non discursive, directe).

L'intelligence met en jeu l'observation et l'analogie : on connaît l'autre par une inférence conduite de l'extérieur vers l'intérieur, selon le rapport que l'on établit entre les signes qu'il laisse s'inscrire à la surface de son visage ou de son corps et ce qui est censé leur correspondre dans le registre des sentiments ou des passions. Sans le savoir, le candidat retrouve là le fondement de la théorie de l'ap­prentissage des « signes naturels « et de l'origine du lan­gage qui fut longuement développée au XVIlle siècle (Condillac, Essai sur l'origine des connaissances humaines et Grammaire, et Rousseau, Essai sur l'origine des langues). Là, bien sûr, on se « met à la place de l'autre « dans l'exacte mesure où l'on sait, par l'expérience du miroir, que l'autre donnant des signes de colère ou de désespoir est intérieurement semblable à ce que l'on est soi-même lorsque l'on se voit (fonction du miroir dans l'analogie) présenter au dehors les mêmes signes. Il y avait là le noyau d'une belle problématique : le rapport de soi à l'autre pourrait-il réellement avoir lieu en dehors de la médiation de ce rapport originaire à soi-même?

 

Ce travail comprend quelques références philoso­phiques, dont l'une semble assez inexacte : le candidat en effet mélange la phénoménologie de Husserl et la théorie de la forme (Gestalttheorie), née de la psychologie et étendue à l'étude des phénomènes physiques, selon laquelle l'élément n'est pas préexistant à l'ensemble, et ne peut être dissocié de la structure. Cette double référence est donc fausse, dans son articulation interne comme par rapport à la problématique essentiellement morale et psychologique dont il est ici question. La seule référence utilisable dans le champ du sujet aurait été chez Husserl la cinquième Méditation cartésienne.

« du psychisme d'autrui par l'intermédiaire d'un raison­ nement à la suite de ses réactions observables ...

Sachant par expérience personnelle que le rire est le signe de la joie, je conclus en voyant mon voisin rire 35 qu'il est joyeux.

Cela s'appuie sur une conceptualisa­ tion donnée inconsciemment, fondée sur le principe de causalité qui veut que les mêmes causes produisent les mêmes effets, et c'est par une induction que j'arrive à cette conclusion que mon voisin est joyeux : j'ai établi 40 là une caractéristique de la nature humaine.

Du point de vue logique le raisonnement est tout a fait correct.

On peut cependant se demander si les pré­ misses sont vraies, ce qui revient à faire la critique de l'induction préalable.

Connaissons-nous nos propres 45 réactions? Y a-t-il un principe universel qui veut que le rire soit signe de la joie? Tels sont les points sur les­ quels se porteront les critiques des adversaires de cette doctrine.

Nous ne connaissons pas nos expressions exté- 50 rieures, notre mimique nous est donnée par l'interven­ tion d'autrui, sans lequel on n'aurait pas conscience de notre attitude.

De plus, pour un état de conscience (ici la joie), il existe différents états de comportement : par exemple le rire, mais aussi les pleurs qui témoignent 55 paradoxalement d'une joie infiniment plus grande chez certaines personnes.

En outre, le raisonnement analo­ gique ne permet de comprendre que les actes d'autrui qui à l'occasion sont aussi les nôtres ...

Or comprendre , autrui revient surtout à comprendre ses propres réac- 60 tions (ce en quoi lui et moi nous différons).

Enfin la principale objection réside dans le fait que l'enfant par exemple comprend autrui bien avant de pouvoir rai­ sonner.

Donc cette thèse ne peut pas nous satisfaire, sur bien des points.

Nous serions plutôt tentés d'adop- 65 ter la première solution qui consiste à comprendre autrui, de manière intuitive, sur son comportement.

Cette idée a vu le jour avec les travaux de Husserl (la phénoménologie) qui pensait que l'étude du comporte­ ment, de ses gestes (la Gestalttheorie) permettait 10 d'avoir une compréhension d'autrui assez juste, en ce. »

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