Devoir de Philosophie

Philosophie: Conseils de méthode pour la dissertation et le commentaire de texte

Publié le 11/02/2011

Extrait du document

philosophie

S’exercer à l’argumentation: homogénéité de la démarche philosophique

L’exercice de la dissertation philosophique, l’analyse d’un texte, la réflexion sur une notion ou un couple de notions du programme de philosophie de terminale ont un but commun: former l’esprit à l’argumentation. Pour ce faire, on effectuera les opérations suivantes, quel que soit l’exercice proposé, conformément aux instructions de l’arrêté du 8 août 2000 et aux informations de la Desco du 31 mai 2001, du Bulletin Officiel de l’Éducation nationale du 5 juillet 2001 (cf. Recommandations concernant l’apprentissage du questionnement, de l’argumentation et de l’analyse philosophiques – écrit et oral).

CONSTRUCTION D’UNE PROBLÉMATIQUE À PARTIR D’UNE NOTION, D’UNE QUESTION OU D’UN TEXTE; EXPLICITATION DU PROBLÈME ET REPÉRAGE DES ENJEUX

Premièrement, la construction d’une problématique est la mise en place d’un problème. Pour le comprendre, il convient de distinguer le problème de la simple question. Une question (Suis-je réellement doué pour la sculpture?) n’est pas nécessairement un problème (Dois-je poursuivre mes études de mathématiques ou me consacrer à la sculpture?). Un problème désigne toujours, par définition, une contradiction ou alternative. L’une des principales opérations philosophiques consiste donc à tirer un problème d’une notion, telle que la liberté, le désir, etc., d’une question qui peut être celle d’un sujet de dissertation, ou d’un texte. Dans ce dernier cas, la problématique dépendra de la confrontation de la thèse défendue par l’auteur et de celle qu’il combat, explicitement ou non (cf. sur ce point la méthodologie du commentaire de texte). Dans tous les cas, l’objectif est de montrer que l’analyse d’une notion, d’une question ou de la thèse d’un auteur n’ont rien d’évident, qu’ils sont problématiques, même s’il n’y paraît pas. Prenons un exemple. À la question «Peut-on se mentir à soi même?», on serait tenté de répondre qu’il existe nécessairement un mensonge à soi, que le cas de la mauvaise foi en est la preuve. Telle est la réponse la plus évidente à la question. Et cependant, comme tout mensonge, le mensonge à soi implique l’intention de mentir, la volonté active de dissimuler une vérité. Or, il est a priori contradictoire de supposer qu’un individu puisse se cacher intentionnellement une vérité dont il a en même temps conscience, qu’il connaît par conséquent. D’où le problème, qui justifie que la question soit posée: d’un côté, il semblerait que l’on ait la possibilité effective de se mentir à soi-même, comme l’atteste apparemment l’expérience de la mauvaise foi ou le pouvoir qu’a chacun de s’illusionner sur ses propres capacités ou qualités; mais, d’un autre côté, il est contradictoire de supposer que l’on puisse être victime d’une manipulation ou dissimulation dont on serait soi-même l’auteur.

Deuxièmement, tout problème exige d’être explicité, c’est-à-dire développé et justifié. Le développement d’un problème permet d’en repérer les enjeux, les implications. Deux exemples permettront de le comprendre. Dans le cas du problème portant sur le mensonge à soi, l’enjeu est de savoir si la conscience a une unité – auquel cas le mensonge à soi est impossible – ou si elle est double et, dans ce cas, comment est-ce concevable? Il s’agit donc de définir la nature de la conscience, voire celle du psychisme: le psychisme humain lui-même n’est-il pas double en effet: conscient d’un côté, inconscient de l’autre, ce qui rend possible le fait de se cacher à soi-même une vérité indésirable ou dérangeante et, dans tous les cas, «refoulée»? Mais cela supposerait qu’il n’existe pas à proprement parler de «mensonge à soi», de volonté consciente de se tromper, et par conséquent de responsabilité individuelle face à la vérité. L’enjeu du sujet consiste donc à déterminer la nature de la conscience, celle du psychisme et, ce faisant, le pouvoir et les limites du pouvoir que l’homme a sur lui-même. Prenons un second exemple. On peut tirer de la notion de désir le problème suivant: le désir est-il un simple manque, signe de mon impuissance et incapacité à être pleinement ce que je suis, ou bien est-il au contraire source de joie, d’action et de créativité? La première perspective implique une dévaluation du désir et du corps dont il dépend au profit du pouvoir positif de la volonté et de la raison: parce qu’il est un être de désir, l’homme y est conçu comme essentiellement insatisfait et imparfait. La seconde perspective, au contraire, permet une réhabilitation du désir, opposé ici au simple besoin: l’homme y est considéré comme capable de subvertir par ses désirs les règles naturelles, de dépasser la nature et de se dépasser. Deux conceptions opposées de l’homme sont ainsi mises en présence: tel est l’un des enjeux du problème posé.

EXPOSITION IMPARTIALE D’UNE THÈSE ; RESTITUTION D’UNE ARGUMENTATION DANS UNE ÉTUDE DE TEXTE

Une fois le problème posé et ses enjeux repérés, il convient, afin de procéder avec rigueur et d’éviter toute confusion, d’adopter dans un premier temps une thèse et une seule. Dans le cas de la dissertation ou de l’étude d’une notion, on choisira donc d’abord de développer l’un ou l’autre des deux membres de l’alternative ou de la contradiction relative au problème posé. On le fera « impartialement », c’est-à-dire de la manière la plus objective possible – donc sans parti pris ni préjugé. En particulier, on évitera les longues descriptions sans fruit, celle, par exemple, des effets présumés « pervers » du désir si l’on compte montrer que celui-ci est essentiellement source de manque et d’insatisfaction, ou encore celle des conséquences supposées « tragiques » de la mauvaise foi si l’on veut prouver qu’il existe une possibilité de se mentir à soi-même. Tout développement requiert que l’on défende une thèse au moyen d’arguments, et tout argument désigne un raisonnement dont le but est de prouver ou d’infirmer une thèse. On évitera donc à la fois la succession de petites remarques sans lien les unes avec les autres, le ton moralisateur et les formules toutes faites, qui renvoient toujours à des idées reçues. De la même manière, il conviendra, à l’occasion d’une étude de texte, de restituer l’argumentation de son auteur dans le but exclusif de la comprendre, abstraction faite du sentiment d’étrangeté voire de fausseté qu’elle peut d’abord susciter. Ainsi, dans un texte donné aux séries ES en juin 1999, Nietzsche affirme que ce que nous appelons liberté désigne en réalité un état où nous n’apercevons pas les «chaînes» dont nous dépendons, en un mot l’état de servitude où nous nous trouvons sans le savoir. Cette thèse, pour être bien comprise, devra être longuement défendue et analysée, au moins dans un premier temps, abstraction faite du sentiment que nous avons pourtant d’être libres, car c’est précisément ce sentiment de liberté que Nietzsche désigne comme illusoire: il arrive en effet que nous ayons l’impression de choisir librement un métier ou un mode de vie, alors que ce choix résulte en réalité de l’influence inaperçue qu’exercent sur nous notre entourage immédiat ou la société, indépendamment de nos capacités ou de nos motivations profondes.

ÉLABORATION D’UN CONCEPT OU D’UNE DISTINCTION CONCEPTUELLE On ne saurait développer une thèse ou une autre ni plus généralement aucune réflexion à propos d’une question, d’un texte, ou d’une notion sans un travail d’analyse conceptuelle. Ce travail consiste à déterminer, développer, compléter progressivement la définition des termes d’un énoncé ou celle des notions importantes d’un texte. Par exemple, dans un sujet portant sur l’illusion, on parviendra à élaborer ce concept à partir de l’analyse d’exemples précis, telle que celle de l’existence du père Noël pour l’enfant ou celle d’un Dieu anthropomorphique, capable de colère ou de sévérité; à cette occasion on distinguera rigoureusement l’illusion à la fois de la simple erreur et de la faute. Contrairement à l’erreur en effet, purement incidente, l’illusion est le produit d’un désir ou d’un intérêt. À la différence de la faute, cependant, elle n’est pas pour autant et à proprement parler volontaire, sans quoi l’on ne serait pas «victime» de ses illusions.

CONFRONTATION DE THÈSES VISANT À L’ÉLABORATION D’UNE RÉPONSE RÉFLÉCHIE À LA QUESTION POSÉE

Une réponse réfléchie est le contraire d’une réponse hâtive, donnée par avance et artificiellement défendue. Pour y parvenir, il convient, dans la dissertation, de développer successivement, pour les comparer et évaluer, deux thèses distinctes, et, dans l’analyse de texte, de rapporter la thèse de l’auteur à celle qu’il combat. Sur ce point, on se reportera à la méthodologie de la dissertation ainsi qu’à celle du commentaire. Expliquons cependant rapidement la raison d’être de cette recommandation: dans le cas, en particulier, de la dissertation ou dans celui de l’analyse d’une notion, l’argumentation développée consiste en une confrontation et un examen soigneux des réponses différentes, voire contradictoires, qui peuvent être apportées à une même question. Il s’agit de tester ainsi la légitimité de chacune d’entre elles et d’adopter, pour finir, celle qui semble la plus satisfaisante. Cette attitude, qui consiste à considérer et à approfondir des positions distinctes de celle que l’on serait tenté d’adopter spontanément sur une question, est la clef de tout véritable dialogue, avec soi-même et avec autrui. Ce n’est pas une règle arbitraire ou un jeu de l’esprit. Ainsi apprend-on à ne pas répondre hâtivement à une question, c’est-à-dire avant de l’avoir comprise et d’en avoir saisi tous les aspects. Tel est tout particulièrement le but de la dissertation de philosophie: s’exercer à se déprendre de ses préjugés ou idées «hâtives» sur une question, et ne considérer que l’on a une pensée propre, une pensée véritablement personnelle, qu’au terme d’une réflexion et d’une confrontation d’idées opposées, non à la première lecture du sujet. Voilà pourquoi, en posant un problème à partir d’une notion, d’un sujet ou d’un texte, en le résolvant grâce à l’analyse rigoureuse des termes nécessaires à leur compréhension et à la confrontation des réponses possibles, il s’agit toujours de découvrir ce que l’on va penser et non de développer longuement et artificiellement une idée ou une intuition que l’on aurait dès le départ sur le sujet, la notion ou la thèse de l’auteur.

ÉVALUATION D’UN ARGUMENT PAR SON INSERTION DANS UN DIALOGUE CRITIQUE OU PAR SA CONFRONTATION À DES EXEMPLES

Il convient d’éprouver la valeur d’un argument, lequel sans cela peut s’avérer insuffisant, voire faux. On peut alors procéder: 1. soit en insérant l’argument dans un dialogue critique, c’est-à-dire en testant sa légitimité au moyen d’objections ; 2. soit en le confrontant à des exemples, c’est-à-dire en cherchant s’il n’existe pas des contre-exemples susceptibles d’invalider l’idée qu’il a pour fonction d’étayer, de prouver. Il va de soi que ces deux opérations sont complémentaires. Sur le statut de l’exemple, on se reportera à la remarque figurant dans la méthodologie de la dissertation (sur le travail préalable d’analyse au brouillon).

PROGRESSION ARGUMENTÉE DANS LES ÉTAPES DE L’ANALYSE

Dans un sujet de dissertation comme dans un commentaire de texte, la progression de l’analyse s’effectue par étapes: or, le passage d’une idée simple à une idée plus complexe, voire d’une thèse à laquelle on serait tenté d’adhérer spontanément à une thèse moins évidente, doit nécessairement être argumenté, c’est-à-dire justifié.

APPRÉCIATION DES RÉSULTATS D’UN PARCOURS ARGUMENTATIF

Il s’agit de dresser un bilan. À la fin d’un développement oral ou de chaque partie d’un devoir écrit – et a fortiori à la fin du devoir lui-même –, il est nécessaire en effet de rappeler et de résumer les différents arguments avancés mais aussi et surtout le lien qui les unit et qui a permis de passer de l’un à l’autre. Ainsi peut-on apprécier, évaluer, les résultats obtenus. Ce travail de récapitulation doit être renouvelé aussi souvent que possible: il permet de s’assurer que l’on répond bien à la question du texte ou à celle du sujet et de contrôler la rigueur de l’argumentation.

 

Deux types d’exercice: la dissertation, le commentaire de texte

1. La dissertation OBJECTIF

Dans la dissertation de philosophie, l’objectif poursuivi est de: – poser un problème à partir de la question du sujet; – résoudre celui-ci au moyen d’une argumentation rigoureuse. Reprenons ces deux points. Premièrement, si l’on veut comprendre le sens d’une question, un problème doit nécessairement en être tiré. Deuxièmement, le problème, une fois posé, doit être résolu au moyen d’une argumentation rigoureuse. Celle-ci repose sur un travail d’analyse des termes du sujet: il s’agit toujours, en philosophie, de savoir ce que l’on dit et de s’entendre d’abord sur les mots avant de prendre position sur une question, afin d’éviter malentendus et contresens. Ainsi, dans le sujet «Toutes les opinions se valent-elles?», l’opinion désigne-t-elle une conviction, un point de vue fondé en raison, ou un simple préjugé (comme semble l’attester l’expression péjorative de «débat d’opinions»)? Ce faisant, l’argumentation développée consiste en une confrontation des différentes réponses pouvant être apportées à une même question.

ANALYSE ET RÉDACTION

La dissertation est composée de trois grandes parties: l’introduction, le développement, la conclusion. Sa rédaction suppose que soit effectué, au préalable, un travail d’analyse du sujet au brouillon.

Le travail préalable d’analyse (au brouillon) Ce travail conduit à découvrir un problème relatif au sujet. Il permet une première analyse des termes et de la question. Pour en faciliter la réalisation, plusieurs rubriques sont développées dans les corrigés: - les notions en jeu désignent les notions du programme auxquelles le sujet fait, implicitement ou non, référence; - le domaine de réflexion renvoie au champ de réflexion philosophique auquel s’applique la question, s’il y a lieu: par exemple, il peut s’agir de philosophie politique, d’esthétique, de métaphysique, d’épistémologie (ou philosophie des sciences), etc. Cette rubrique a pour fonction de limiter les contresens qui peuvent être faits sur un sujet: par exemple, l’un des sujets donnés en série S, en juin 1998, était: «La valeur d’une théorie se mesure-t-elle à son efficacité pratique?» Faute d’avoir délimité le domaine de réflexion concerné, beaucoup d’élèves ont rattaché la question aux notions «théorie et expérience» (c’est-à-dire à la philosophie des sciences), et n’ont pas vu la dimension morale et politique de la question; - les difficultés: il convient de relever les principales difficultés du sujet afin de ne pas les éluder. L’exercice de la dissertation consiste précisément à les repérer et à les aborder, quitte à ne les surmonter que partiellement ; - le(s) présupposé(s) désigne(nt) ce qui, dans une question, est implicitement considéré comme acquis ou allant de soi. Par exemple, le sujet «Toutes les opinions se valent-elles?» présuppose que toutes les opinions ont une valeur – ce qui pourra être remis en cause dès l’introduction, ou au contraire au cours du développement: au regard d’une connaissance véritable, en effet, les opinions, en tant qu’affirmations arbitraires et insuffisamment fondées, sont toutes également dépourvues de valeur; - les définitions donnent un sens précis aux termes du sujet. Elles sont naturellement susceptibles d’être remaniées et approfondies au cours du développement. Des termes apparemment secondaires (par exemple, «valent» dans le sujet précédemment cité) ne doivent pas être négligés; - le problème: il s’agit de poser un problème à partir des premiers éléments d’analyse obtenus sur le sujet – en particulier à partir de la définition des termes de la question. Remarque: lors de ce travail préalable, il conviendra de chercher des exemples simples et de les analyser en vue de mieux comprendre la question du sujet ou d’y apporter des réponses différentes. Un exemple doit donc avoir une valeur générale et représentative; il représente une idée que l’on veut saisir ou défendre; ni imprécis ni trop particulier, il sera donc choisi avec soin. Par exemple, à propos du sujet «Peut-on dire d’un acte qu’il est inhumain?», il n’est pas utile de parler de crimes «odieux» ou monstrueux en général; il est également superflu d’entreprendre la description détaillée de tel ou tel crime crapuleux. En revanche, on pourra analyser avec attention la notion de crime contre l’humanité, à travers l’exemple du crime nazi. Ajoutons, pour finir, que l’exemple ne se substituera jamais à l’argument: il doit permettre de le découvrir ou de l’illustrer.

L’introduction - Du point de vue du contenu, l’introduction a pour fonction de: 1) montrer l’intérêt de la question (pourquoi elle se pose); 2) dégager une problématique (tirer un problème du sujet). - Du point de vue de la forme, le problème sera énoncé, en fin d’introduction, au moyen d’une question, à laquelle le développement aura pour but de répondre. Pour ne pas, cependant, prendre une simple question pour un problème, on veillera à présenter celui-ci sous forme d’alternative ou de contradiction (ou bien... ou bien au contraire...). L’annonce du plan de dissertation, en fin d’introduction, a quelque chose d’artificiel; c’est pourquoi nous vous la déconseillons. - Le schéma que nous avons tenté de respecter systématiquement dans la mise en forme des introductions n’est pas le seul possible, mais, rigoureusement appliqué, il vous aidera à bien introduire une argumentation. Ce schéma est le suivant: 1) un exemple simple et bien adapté au sujet sera d’abord exposé; 2) cet exemple sera l’occasion de définir sommairement les termes du sujet et d’énoncer un premier point de vue – le plus évident – sur la question (par exemple: Oui, il va de soi que toutes les opinions se valent); 3) une objection remettra en cause ce point de vue (cf. les introductions rédigées où elle est annoncée par un pourtant, cependant, etc.); 4) le problème né de la contradiction entre le point de vue d’abord adopté sur question et celui qui résulte de l’objection sera alors, pour finir, repris et résumé sous forme interrogative. Il est déconseillé de multiplier les questions en fin d’introduction: un unique problème, clairement formulé, doit être posé.

Le développement A. Qu’est-ce qu’un plan? Tout développement suppose qu’un plan ait été fait préalablement au brouillon. Ce plan doit être détaillé, c’est-à-dire comprendre des parties et des sous-parties, voire quelques brefs paragraphes d’argumentation, si vous éprouvez quelques difficultés à rédiger. La notion de plan en philosophie reste cependant ambiguë: d’un côté, le plan est nécessaire pour structurer un devoir; d’un autre côté, il reste purement formel et vide de contenu s’il ne comprend pas en lui-même un minimum d’analyse (cf. les plans détaillés parmi les corrigés proposés). B. Les grandes règles du développement - Le développement sera, de préférence, constitué de trois parties: chacune d’elles devra proposer clairement une réponse et une seule à la question du sujet. Il convient donc de ne pas introduire de contradictions au sein d’une même partie – sauf cas exceptionnel. - Le plan suivi sera dialectique. En d’autres termes, il progressera par contradictions d’idées, à travers la structure du plan: thèse, antithèse, synthèse ou antithèse, thèse, synthèse; il va de soi que l’on est libre de commencer par apporter une réponse positive ou négative à la question. Toutefois, il ne suffit pas de répondre «oui» en première partie, «non» en deuxième partie, et, à titre de synthèse, «tantôt oui tantôt non» pour constituer un plan dialectique: pour que les points de vue considérés successivement soient réellement dialectisés, et non pas opposés sans justification, il importe de soigner les transitions qui constituent les articulations essentielles du devoir et le ressort de la réflexion. Chacune de ces transitions comprendra une objection – c’est-à-dire un argument avancé contre les arguments défendus dans la partie que l’on vient d’achever. - Enfin, le développement doit être progressif, c’est-à-dire débuter avec le point de vue le plus simple sur la question (en première partie), pour aboutir au point de vue le plus complet et le plus substantiel (dans la synthèse). Remarques: • Le plan thématique sera évité, dans la mesure où il porte trop souvent l’élève à juxtaposer des points de vue différents au lieu de les lier entre eux et tenter de les dépasser. • La synthèse est souvent délicate à constituer; elle réside: 1. soit dans l’adoption d’un point de vue plus large, qui intègre les deux précédents; 2. soit dans la remise en cause de l’un des présupposés du sujet – ce qui a été évoqué plus haut. L’exemple du sujet corrigé n° 4 illustre la situation 1. Celui du sujet corrigé n° 6 renvoie à la situation 2. C. L’argumentation Les différentes réponses à la question, examinées successivement, seront choisies principalement: – en vertu des sens possibles d’un ou de plusieurs des termes du sujet: dans l’exemple «Toutes les opinions se valent-elles?», la question ne recevra pas la même réponse si l’on entend par opinion un point de vue ou une conviction qui n’exclut pas la réflexion, ou si on l’assimile au contraire au pur préjugé; – en vertu des points de vue qui peuvent être pris en considération sur une même question. En l’occurrence, une opinion peut avoir plus ou moins de valeur d’un point de vue moral et politique, pour autant qu’elle n’est pas sans incidence sur l’action: c’est en effet parce que l’on agit le plus souvent selon ses convictions qu’il semble nécessaire d’accorder une valeur moindre à l’opinion d’une personne raciste qu’à celle d’une personne convaincue de l’égalité des hommes. En revanche, n’importe quelle opinion est dépourvue de valeur du point de vue de la connaissance : par exemple, la simple conviction sans fondement selon laquelle la fin du monde est proche n’a pas plus de valeur, au regard de la science, que l’opinion par laquelle on affirme que le monde est éternel – elle n’est pas plus justifiée qu’elle, pas mieux fondée en raison.

La conclusion Elle consiste à établir le bilan de l’argumentation développée, puis à rappeler et résumer la position que l’on a finalement choisi d’adopter sur la question – c’est-à dire dans la troisième partie. On peut également et éventuellement ouvrir le sujet sur une perspective ou une question plus large. Cela n’est pas une nécessité.

2. Le commentaire de texte OBJECTIF - Le commentaire consiste à dégager l’intérêt philosophique d’un texte en procédant à son étude ordonnée. - L’objectif essentiel du commentaire réside dans la compréhension du texte, à partir de sa lecture attentive et de son analyse détaillée. - L’auteur du texte y établit une thèse, dont il s’agit de montrer l’intérêt et la portée. - En principe, le texte proposé doit pouvoir être expliqué par lui-même, sans aucune référence extérieure (cf. les conseils relatifs à l’intérêt philosophique du texte; cf. aussi la précision apportée par le nouveau programme à ce sujet). - La règle d’or du commentaire consiste à porter un regard neuf sur le texte, c’est à dire libre de tout a priori sur sa signification. Celle-ci n’est véritablement comprise qu’au terme d’une analyse.

ANALYSE ET RÉDACTION Le travail préalable d’analyse Le travail préalable d’analyse du texte peut être ordonné, là encore, selon plusieurs rubriques: - les notions en jeu désignent les notions du programme auxquelles le texte fait référence; - la thèse adverse est la thèse que combat, explicitement ou non, l’auteur; - les procédés d’argumentation concernent la manière dont la thèse est défendue: ce peut être par l’analyse approfondie d’un exemple, par une comparaison, une démonstration, un raisonnement par l’absurde, etc.; - le découpage du texte et les idées principales: il s’agit ici de distinguer les différentes parties du texte correspondant aux principales idées qui y sont énoncées; on opérera ce découpage en fonction des articulations logiques qui indiquent, dans le texte, un tournant, une rupture ou une autre phase de l’argumentation; - remarques et difficultés: termes et phrases difficiles ou énigmatiques seront soigneusement relevés et expliqués. Mieux vaut toujours se risquer à une interprétation qui peut éventuellement être contestée plutôt que d’éluder une difficulté dont l’élucidation est nécessairement féconde pour l’explication. Les termes se faisant écho ou ayant une même signification devront être regroupés et analysés dans le contexte particulier du texte. La signification qu’ils ont indépendamment de ce contexte est souvent intéressante à rappeler mais elle ne doit pas être un prétexte pour faire dériver le propos: par conséquent, elle ne sera évoquée ou même développée que dans le but d’éclairer le sens du texte et d’en approfondir l’analyse. Le développement proprement dit reprendra et enrichira ce travail d’analyse conceptuelle, particulièrement important; - thème, question, thèse: le thème désigne l’objet général du texte; la question est celle que pose, souvent implicitement, l’auteur, et à laquelle il répond par la thèse qu’il établit; la thèse renvoie au point de vue original qu’il défend. - On n’omettra pas, pour finir – ce que nous n’avons pas eu la possibilité matérielle de développer dans les analyses préalables des corrigés proposés –, de rechercher très précisément quelle est la structure logique du texte. Pour ce faire, on relèvera tous les mots de liaison en vue d’indiquer le rôle joué, d’un point de vue logique, par chacune des phrases qu’ils introduisent: par exemple, le terme «mais» peut introduire une objection, «donc» une conséquence, et d’autres termes encore une réfutation, un argument, une hypothèse, une thèse, une restriction, etc.

L’introduction Elle a pour fonction de montrer l’intérêt de la thèse défendue et d’expliquer pourquoi elle ne va pas de soi. Dans ce but, on peut commencer par énoncer la thèse à laquelle l’auteur s’oppose, ouvertement ou non, pour exposer ensuite le thème, la question et la thèse du texte. Il est souhaitable d’achever l’introduction par une ou plusieurs questions relatives au sens de la thèse énoncée ou à l’intérêt philosophique du texte. Il est possible d’annoncer le plan du texte. Cela reste facultatif.

Le développement La méthode généralement suivie consiste à diviser le commentaire en deux parties: l’une consacrée à l’étude ordonnée, l’autre à l’intérêt philosophique du texte. - L’étude ordonnée désigne l’explication linéaire, non thématique, du texte – ce en quoi le commentaire philosophique se distingue du commentaire littéraire: il s’agit, sauf cas exceptionnel, de suivre l’ordre du texte pour en dégager l’armature logique, la structure argumentative. Si le texte se révèle particulièrement dense et difficile à expliquer, il est possible de réduire l’ensemble du commentaire à cette étude, à condition d’y intégrer une réflexion sur l’intérêt philosophique qu’il présente. On citera soigneusement chaque phrase avant de la commenter, pour faciliter la lecture du correcteur. - L’intérêt philosophique du texte en désigne l’enjeu et la portée. Après l’avoir développé, on peut éventuellement faire référence au point de vue d’un autre auteur, ou encore à celui que le même auteur défend par ailleurs sur la question, de manière complémentaire, dans d’autres textes. Il va de soi cependant que toute référence extérieure doit être parfaitement ajustée au propos car, là encore, elle n’a d’autre but que de permettre une meilleure compréhension de l’intérêt que présente le texte: en d’autres termes, aucune référence philosophique ne doit être un prétexte pour exhiber ses connaissances. En principe, aucune référence extérieure n’est requise. Ajoutons pour finir que cette dernière partie du commentaire consacrée nellement à l’intérêt philosophique du texte est nécessairement plus courte (voire beaucoup plus courte) que la précédente.

La conclusion La conclusion consiste à dresser un bilan de la réflexion développée sur le texte, dont on rappellera éventuellement l’intérêt philosophique.

 

L’usage des connaissances en philosophie

L’usage des connaissances n’est ni un but en soi, ni le moyen de satisfaire à une exigence arbitraire. En utilisant des références et des connaissances, il ne s’agit pas de penser sous l’autorité de tel ou tel auteur et, ce faisant, de renoncer à formuler une pensée personnelle. Grâce au soutien de certaines connaissances soigneusement sélectionnées, il s’agit au contraire d’aller plus loin et plus vite dans l’analyse d’un sujet ou la compréhension des enjeux d’un texte. Un auteur a pu passer une partie de sa vie à résoudre certaines des questions que vous allez traiter en quatre heures. En connaissant la distinction qu’Aristote fait entre le bonheur et le plaisir, par exemple, on ne confondra pas le premier avec le bien-être, le confort personnel ou encore la réalisation de ses désirs, tout au long d’une analyse portant sur la question. Ce qui compte, ce n’est pas la référence par elle-même (personne ne vous sera reconnaissant de parler de Kant ou de Spinoza), mais l’usage que l’on en fait – par rapport au sujet, dans l’économie de son propre développement. Toute référence doit donc être soigneusement commentée et justifiée, donc maîtrisée. Toute remarque allusive à la pensée d’un auteur sera non seulement inutile mais nuisible au déroulement du raisonnement. Mieux vaut ne pas évoquer une référence que l’évoquer mal. Pour finir, il convient de noter qu’une seule référence peut très bien, selon le sujet, suffire dans une dissertation – l’essentiel étant de disposer de définitions précises des notions en jeu dans la question. Pour toutes ces raisons, nous avons tenté ici de réduire au minimum la référence aux auteurs.

Liens utiles