Peut-on vivre sans ordre ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
«
Tout d'abord il ne faut pas alors oublier qu'une question commençant par « Peut-on » a un double sens.
Peut-onsignifie « est-il possible » mais aussi « est-il légitime », « a-t-on le droit ».
Il ne faudra pas oublier cette doubledimension dans le traitement de la question.
On considère généralement le désordre négativement.
En effet, ledésordre empêche de se repérer correctement, de s'y retrouver, mais le désordre est aussi ce qui, par définition,manque d'organisation et laisse la place à des luttes et des conflits.
C'est donc bien dans les deux senscommunément utilisés que le désordre est ainsi saisi, qu'il s'agisse du désordre dans les choses qui nous entourent,ou du désordre entre les individus qui doivent vivre ensemble.
L'ordre est ainsi ce en quoi la réalité échappe auchaos et à l'arbitraire.
En ce sens, on saisit mal comment nous pourrions vivre sans ordre.
Pourtant, si l'ordre, saisien ce sens, apparaît au premier abord comme nécessaire, le terme d'ordre renvoie également à la notion decommandement.
Un ordre est, en effet, aussi, un commandement venu d'un supérieur et auquel il est nécessaire dese conformer.
Dès lors, la notion d'ordre semble remettre en cause notre liberté.
Vivre sans ordre, ou refuser lesordres c'est considérer que l'on n'a pas à subir un commandement extérieur pour agir et qu'on n'obéirait ainsi qu'àsoi-même.
Tel est d'ailleurs le sens de la notion d'autonomie.
Mais dans ces conditions, comment échapper au chaoset à l'arbitraire ? Ainsi, d'un côté il semble bien difficile de vivre sans ordre et d'un autre, l'absence d'ordre apparaîtcomme la condition de notre liberté.
Puisqu'on peut répondre aussi bien oui que non, cela signifie que le sujet poseproblème.
Une fois que vous avez formulé le problème du sujet ainsi que ses enjeux, vous pouvez, dans un premiertemps, montrer en quoi l'ordre semble nécessaire pour vivre puisqu'il permet d'échapper à l'arbitraire et au chaos.Commencez alors par des remarques simples : le désordre ne permet pas de se repérer et conduit à se perdre.
Parexemple, conduire par ordre ses pensées permet d'avancer et de construire un raisonnement.
L'absence d'ordrerisque de conduire à l'absence de sens.
L'ordre est ce qui assigne à chaque chose sa place et rend alors la réalitéintelligible.
Connaître, c'est en effet d'abord ordonner des sensations diverses.
Sans la saisie d'un ordre dans lanature nous ne pourrions rien connaître.
Ici, vous pouvez penser aux analyses de Kant dans la Critique de la raisonpure à propos de la connaissance.
Kant montre ainsi que connaître c'est commencer par saisir dans l'espace et dansle temps qui sont les formes a prioi de la sensibilité.
En d'autres termes, notre esprit met en ordre le réel.
Vouspouvez également montrer la nécessité de l'ordre dans le domaine politique.
Sans ordre, nous risquons d'êtreconduits à l'anarchie (mot qui signifie absence d'ordre).
Vous pouvez penser ici à la manière dont Hobbes définitl'état de nature, par exemple.
Les hommes ne sont alors mus que par leurs passions et rentrent dans un état deguerre de « tous contre tous et de chacun contre chacun ».
En ce sens, l'ordre comme commandement sembletrouver une valeur puisqu'il est ce qui empêche aussi le désordre et la lutte permanente.
Hobbes montre que le seulmoyen de sortir de cet état de guerre est qu'un pouvoir fort qui suscite la crainte et impose le respect.
Aussi biendans le champ de la connaissance que dans le champ politique, il semble donc bien difficile de vivre sans ordre.Pourtant, l'ordre n'apparaît-il pas également comme ce qui freine l'innovation ou brime la liberté ? On parle en cesens souvent de manière péjorative de « l'ordre moral » par exemple.
On oppose ainsi généralement l'ordre auprogrès.
Si l'ordre est ce qui structure, il est aussi ce qui empêche les individualités de s'exprimer.
C'est en ce sensqu'on qualifie souvent les partisans de l'ordre de réactionnaires.
C'est bien ce qu'on retrouve plus précisémentencore dans la notion d'ordre entendue comme commandement.
Montrez en quoi le commandement extérieursuppose une soumission et s'oppose à la liberté.
Ici, vous pouvez penser aux analyses de l'anarchisme qui refusenttout principe extérieur d'autorité religieuse ou politique.
C'est en ce sens qu'il faut comprendre la formule deBakounine « Ni Dieu, ni maître ».
Elles s'accompagnent d'une critique de l'Etat au nom de l'individu puisque tout Etatest tyrannique et empêche la libre expression de l'individu en réglementant la vie sociale.
Mais l'absence d'ordre nerisque-t-elle pas de rendre la vie impossible.
C'est une telle tension qui a pu se poser au début du 19è siècle à lasuite de la Révolution française.
L'humanité est en crise.
La Révolution française vient d'avoir lieu.
Nous assistons àl'essor de la société industrielle.
Ces développements tendent à procurer aux hommes davantage de liberté maissemblent être le terreau de l'égoïsme et de l'individualisme.
Deux tendances antagonistes s'opposent : l'uneréactionnaire, incapable de progresser, voudrait en revenir à un état antérieur ; l'autre, révolutionnaire, incapable deconstruire.
Cette tension qui se déploie oppose d'un côté l'ordre et de l'autre le progrès.
Les partisans d'un retour àl'ordre voient le progrès comme synonyme d'anarchie, les partisans du progrès voient l'appel à l'ordre comme unerétrogradation.
Il s'agirait alors de se demander si cette opposition entre l'ordre et le progrès est légitime.
Ici, vouspouvez, par exemple, vous reporter aux analyses d'Auguste Comte.
Il s'agirait de se demander si on ne peut paspenser un ordre qui ne serait pas incompatible avec le progrès, le développement de la liberté et de l'individu..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Peut-on vivre sans ordre ?
- Pour vivre, laisser vivre - GRACIAN
- Faut-il travailler moins pour vivre mieux ?
- LE TIERS-MONDE : INDÉPENDANCES, CONTESTATION DE L'ORDRE MONDIAL, DIVERSIFICATION
- l'espoir fait vivre