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La Fontaine: La Laitière Et Le Pot Au Lait

Publié le 24/09/2010

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fontaine

 

Au XVIIe siècle, LF, extrêmement inspiré d’anciens auteurs de fables tels Esope ou la Bruyère, écrit lui aussi de nombreux recueils de fables, dans lesquels il peint les travers de ses contemporains et de la société. A travers ses récits, sont souvent mis en scène des animaux-types qui illustrent une morale que LF veut inculquer à ses lecteurs. Cependant, on verra dans la Fable de La laitière et le pot au lait, fable X du livre VII, qu’elle prend des allures bien particulières : en effet on montrera d’abord que LF donne Perrette en pâturer aux lecteurs, mais qu’il se range ensuite de son côté.

 

I - Un récit sous forme de farce (montrer l’originalité d’une telle démarche)

 

   A) Une 1ère partie narrative de la fable

   * La fable débute par le nom « Perrette «, définissant ainsi d’emblée le personnage dont il va être question. (analyse ? --> complicité avec le lecteur) De plus l’utilisation de l’adjectif possessif « notre laitière « montre bien que c’est l’héroïne de la fable : tous les « regards « sont braqués sur elle.

   * Le système des temps utilisé est celui du passé, avec des imparfaits tels que « prétendait, allait, comptait... « qui seront suivis de présents de narration, qui marquent l’action (« saute «...)

   * « On l’appela le Pot au lait « : son histoire est plus qu’un simple fait divers, elle prend des allures de mythe populaire, servant d’exemple.

   * Les pensées de Perrette sont rapportées au discours direct « Il m’est, disait-elle, facile... « dans lequel elle s’exprime au système temps présent, utilisant de nombreux futurs « j’aurai, sera, empêchera «... Cela permet au lecteur de s’immiscer dans ses pensées : Perrette fait preuve de zèle et imagine déjà son futur. (elle se projette dans un avenir pourtant bien incertain)

 

   B) Une marche rythmée

   * l’utilisation de l’imparfait « prétendait « dès la description de la laitière marque une action déjà en cours : on est directement propulsé avec elle dans sa marche.

   * On remarque un rythme binaire : « tout le prix de son lait, / en employait l’argent ; / achetait un cent d’oeuf /, faisait triple couvée «, connotant une idée de cadence régulière et rapide (avec la juxtaposition de tous ces verbes conjugués).

   * La laitière est qualifiée de termes tels « légère, agile... « qui peuvent définir l’attitude de légèreté de sa marche vive et rapide, mais également de son esprit frivole et rêveur : au final, ce sont ces deux causes qui la feront tomber.

 

   C) Le registre ironique

 

   * Dans son long discours, Perrette pose la question « et qui m’empêchera.. ? «, ce à quoi l’ironie du sort pourrait répondre : elle-même !

En effet, son long discours de 10 vers contraste avec la phrase marquant l’incident « le lait tombe « : phrase brève, en début de vers, composée de 3 monosyllabes et suivi de deux points, qui enclenche une gradation descendante « adieu veau, vache, cochon, couvée « : opposition des termes quant au projet de Perrette. De plus, on a une image du lait qui s’écoule de plus en plus au fur et à mesure que Perrette se désole. Un petit incident de rien peut nous faire rapidement déchanter.

   * On a vu que Perrette était vêtue d’un « cotillon simple «, montrant ainsi que c’est une femme du peuple ; pourtant il y a une certaine ironie lorsque LF utilise le terme « la dame de ces biens « : il se moque de sa façon de croire qu’elle pouvait être riche. (mais gentiment...)

   * Perrette a un côté assez ridicule et enfantin : comme les enfants, elle rêve et est maladroite, mais surtout elle est soumise à son mari : « va s’excuser à son mari, En grand danger d’être battue «. Ses rêves sont donc vite rattrapés par sa condition et sa honte.

 

II - Une morale qui peut s’adresser au fabuliste lui-même

 

   A) Une morale universelle

   * Dans la 2ème partie de la fable, la morale peut concerner tout le monde : les deux questions rhétoriques « quel esprit... ? qui ne fait... ? « visent donc tout le monde sans exception. (« autant les sages que les fous «)

   * LF cite des grands noms tels que « Piccochole, Pyrrhus, la Laitière « (précisez l’allusion) : il souhaite donc dire dans sa morale de ne pas avoir honte, car tout le monde, même de grands personnages, peuvent rêver.

   * Il utilise un présent de vérité générale « bat, fait... «, propres à la morale.

 

   B) La Fontaine s’identifie à Perrette

 

   * l’utilisation du « je « et de la 1ère personne montrent bien que le fabuliste ne refuse pas de lui-même se donner en exemple : il exprime ainsi ses propres rêves, qui dévoilent ainsi une certaine fragilité et une sensibilité du fabuliste. On en est attendri.

   * « il n’est rien de plus doux « pour LF que de rêver : il pardonne d’avance ce petit défaut, car au final il ne fait de mal à personne.

   * « Je suis gros Jean comme devant «  est une expression qui signifie qu’il est anonyme, banal, et de plus, le fait qu’il utilise son propre prénom (Jean de la Fontaine) qualifié de l’adjectif « gros « n’est pas anodin : il fait preuve d’auto-dérision.

 

   C) Un rêve d’enfant

   * Comme LF le dit lui-même dans le Pouvoir des fables, il n’y a rien de tel que d’écouter une histoire, car on fait travailler son imaginaire et on retrouve ainsi son âme d’enfant.

   * On relève une juxtaposition dans les vers 39- 40, de verbes d’action « je m’écarte, je vais détrôner (...), On m’élit (...), mon peuple m’aime «, accentuée par une gradation ascendante quant à la « gloire « de ces gestes. Cela montre une évolution ininterrompue des rêves de la Fontaine. (LF redevient enfant quand il rêve)

   * Le fabuliste rêve d’abondance : on le voit bien dans la répétition de l’adverbe « tout , tous, toutes «.

   * le terme « défi « connote bien un esprit enfantin, une certaine compétition avec la réalité : ne pas avoir peur de rêver.

 

Nous avons donc montré que cette fable revêt des aspects bien particuliers : à la fois c’est une farce qui se moque de Perrette, mais le fabuliste fait preuve d’auto-dérision en se plaçant de plein gré du côté de son héroïne. Ce n’est donc pas une morale qui critique, mais qui au contraire pousse à laisser prospérer ses rêves.

 

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