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La cueillette - APOLLINAIRE

Publié le 11/02/2011

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apollinaire

Nous vînmes au jardin fleuri pour la cueillette. Belle, sais-tu combien de fleurs, de roses-thé, Roses pâles d'amour qui couronnent ta tête, S'effeuillent chaque été ? Leurs tiges vont plier au grand vent qui s'élève. Des pétales de roses ont chu dans le chemin. O Belle, cueille-les, puisque nos fleurs de rêve Se faneront demain ! Mets-les dans une coupe et toutes portes closes, Alanguis et cruels, songeant aux jours défunts, Nous verrons l'agonie amoureuse des roses Aux râles de parfums. Le grand jardin est défleuri, mon égoïste, Les papillons de jour vers d'autres fleurs ont fui, Et seuls dorénavant viendront au jardin triste Les papillons de nuit. Et les fleurs vont mourir dans la chambre profane. Nos roses tour à tour effeuillent leur douleur. Belle, sanglote un peu... Chaque fleur qui se fane, C'est un amour qui meurt ! Guillaume APOLLINAIRE, Il y a, 1925.

Vous ferez de ce texte un commentaire composé, en montrant par exemple comment s'y mêlent les thèmes de la nature, de l'amour et de la nostalgie.   

le libellé

Le libellé oriente nettement l'étude du poème en déterminant trois axes de lecture : la nature, l'amour, la nostalgie. Il n'y a aucune raison de refuser ce choix qui, effectivement, correspond à l'essentiel du texte. Il faudra simplement s'efforcer de ne pas cloisonner ces thèmes lyriques qui « se mêlent «, comme le dit, d'ailleurs, le libellé.

première lecture première organisation

La première étape consiste à regrouper les remarques autour des principaux thèmes.

La nature 1. Les fleurs.

Les roses occupent une place centrale.

  • Fleurs reines, symbole de beauté et de fragilité, elles sont expressément nommées dans quatre strophes sur cinq.

apollinaire

« « l'agonie amoureuse des roses », avec la proximité harmonieuse des sons (reuse/roses).« aux râles des parfums » avec l'image de celui qui expire et qui jette son dernier souffle comme la rose exhaleson dernier parfum.« nos roses tour à tour effeuillent leur douleur » : chaque pétale tombé illustre une souffrance, image que l'onretrouve chez les romantiques et particulièrement chez Lamartine (avec les différences de tonalité que nous évoquerons plus loin) : « La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire ; « A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux ; « Moi, je meurs ; etmon âme, au moment qu'elle expire, « S'exhale comme un son triste et mélodieux.

» L'Automne , Méditations poétiques, XXIII. Enfin le texte d 'Apollinaire se termine par l'équivalence : « ...

Chaque fleur qui se fane, C'est un amour qui meurt ! » Cette fois, les vers posent clairement l'identité entre le flétrisse- ment des fleurs et lafin d'un amour. On constate donc que ces roses, réelles, appartiennent aussi au domaine des sentiments, de la subjectivité, du rêve : le possessif « nos roses tour à tour...

» exprime une affectivité très forte où chaque élément de la naturesemble appartenir aux amoureux (à la différence de l'emploi neutre de l'article défini : « la chambre profane »). Cette appropriation traditionnelle se retrouve, par exemple, dans Tristesse d'Olympio de Victor Hugo : « Nos chambres de feuillage en halliers sont chargés ; « L'arbre où fut notre chiffre est mort ou renversé ; « Nos rosesdans l'enclos ont été ravagées « Par les petits enfants qui sautent le fossé ! » L'abstraction s'accentue avec des expressions comme « Roses pâles d'amour » et surtout « nos fleurs de rêve » : cette dernière formule est àcomprendre en plusieurs sens.

Fleurs, belles, idéalement belles, comme dans un rêve. Fleurs rêvées qui appartiennent à la surréalité. Ces roses, intégrées au champ de la conscience et du sentiment deviennent uniques et doivent être distinguées des« autres fleurs », autres roses pour d'autres amoureux. 2.

Les lieux. La nature se trouve rassemblée en un jardin : « jardin fleuri » (première strophe) ; « grand jardin...

défleuri », «jardin triste » (quatrième strophe).

Ce terme suppose la présence de l'homme, la proximité d'une habitation.

De plus,à la différence des champs, il suppose, en général, une limite.

L'auteur insiste sur cette impression grâce àl'équivalence strictement humaine de « la chambre », « toutes portes closes ».

Le repli sur soi est suggéré aussiavec « la coupe » : vase ou verre qui évoque peut-être le philtre amoureux.

Les allitérations en « c » insistentencore sur cette idée.

Ce monde clos contraste avec l'espace du « grand vent qui s'élève », le « chemin » qui mèneà d'autres lieux, le verbe « ont fui », à la rime. Là aussi, nous retrouvons l'application d'un sentiment, la tristesse. Il reste à expliquer l'adjectif « profane ».

Ce terme s'oppose au domaine sacré, de la nature peut-être.

A moins qu'ilne qualifie la sensualité amoureuse. Le jardin s'anime aussi grâce aux papillons, fleurs vivantes : papillons de jour aux couleurs vives, papillons de nuitternes et sans éclat.

Dans cet ordre d'idées, les notations sensibles sont rares : les roses « pâles », le « parfum »et aussi les « roses-thé », aux pétales translucides, au délicat parfum qui rappelle les feuilles fraîches de thé. L'amour 1.

La femme. Elle aussi, comme le jardin, comme la nature, est imprécise : pas de description, des impressions simplement. La dignité, la royauté : « Roses pâles d'amour qui couronnent ta tête ». La beauté, traduite par la triple apostrophe « belle » placée à chaque début de vers tandis que « mon égoïste », dont le possessif atténue la portée critique, se trouve en fin de vers. Les sentiments amoureux. 2. Évidents grâce à la présence de la femme, ils s'expriment par la médiation des fleurs : « roses pâles d'amour ».Cette expérience est personnelle :emploi de la première personne du pluriel,apostrophe. Elle est générale aussi et Apollinaire exprime là une sorte de règle éternellement vérifiée : « ...

Chaque fleur qui se fane C'est un amour qui meurt ! » On penserait presque à un vers d 'Albert Samain (Au. »

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