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La controverse de Valladolid, pages 175 à 177. Jean Claude Carrière

Publié le 15/09/2006

Extrait du document

 

Ce texte est un extrait du roman de Jean Claude Carrière intitulé La controverse de Valladolid publié en 1992. Ce passage a lieu pendant la controverse opposant Bartolomé de Las Casas, prêtre et homme ayant vécu un certain temps parmi les Indiens, et Ginès de Sepùlveda philosophe rompu à l’art de la polémique tournant autour de la question qui oppose l’idée que les Indiens soient des hommes libres et égaux à celle qu’ils soient une catégories d’êtres inférieurs qu’il faut soumettre et convertir.

Par quels procédés les deux hommes défendent t-ils leur thèse ?

Qui est le vainqueur de ce débat ?

 

  Nous allons tout d’abord analyser l’argumentation de Las Casas pour ensuite étudier celle de Sepùlveda. Nous verrons ensuite lequel de ces deux hommes défendant leur idée différente l’une de l’autre, est le « vainqueur « de cette partie de la controverse.

 

  Le prêtre Las Casas défendant l’idée que les Indiens sont des hommes libres et égaux tout comme les Espagnols le sont, utilise une ponctuation forte. Il utilise de nombreuses phrases exclamatives pour s’adresser au cardinal, il rend ainsi ses phrases violentes et peut ainsi toucher le cardinal et l’assemblée qui l’entourent, « Eminence, cela prouve tout simplement qu’ils sont capables de penser ! «, « Mais le renard ne se bâtit pas de statues ! «.Il utilise aussi des phrases interrogatives destinées au philosophe Sepùlveda, « N’êtes vous pas rusé ? « ou au cardinal, pour se défendre, « Vous ne voudriez tout de même pas essayer ? «, ces phrases rythment sont récit, lui donne comme un sens qui l’aide à persuader. Las Casas admet ses défauts,  « Eminence, je sais que je suis irritable, c’est mon défaut et ma qualité. « alors que Sepùlveda  passe rapidement sur les points faibles de sa personne et de son discours pour ne pas se le faire reprocher par la suite ce qui prendrait une grande importance par la suite dans le débat ( demande de justification… ), « J’ai dit que le renard était rusé, et que les chiens, comme les chevaux, redoutent fort la bastonnade. «.Le prêtre compare ensuite le philosophe à un renard tout comme les Indiens sont désignés comme des sous hommes, «N’êtes vous pas un renard vous-même ? «, « Un renard philosophe, qui pour sa nourriture ronge les pages d’Aristote ? «, « J’ai dit qu’ils sont humains mais d’une catégorie inférieure. «. Par cette comparaison, il démontre que l’on peut aussi comparer les Espagnols et, dans ce cas, un philosophe, à un animal, mais aussi que Sepùlveda n’est pas supérieur aux autres. Il utilise une métaphore pour dénoncer le fait que Sepùlveda reprend les propos déjà confirmés par Aristote, que le philosophe ne réfléchit donc pas par lui-même et utilise donc un argument d’autorité, « Un renard philosophe, qui pour sa nourriture ronge les pages d’Aristote ? «. Las Casas est parfois choqué des propos tenus par le cardinal, (« Est-ce- qu’ils sont sensibles à la douleur ? «) mais ne répond pas par des phrases exclamatives mais par des phrases interrogatives se qui montre sa surprise et son dégoût envers l’idée exprimée « A la douleur ? Vous ne voudriez tout de même pas essayer ? «. Il utilise aussi beaucoup de négations, qui défendent le peuple Indien et pour faire des constatations « Il ne creuse pas de canaux, il va tout nu dans la broussaille, il ne paie pas d’impôts, le renard ! «. Las Casas touche les sentiments de ceux qui l’écoutent et le lecteur par la double énonciation, il tente de persuader l’auditoire.

L’argumentation de Sepùlveda prend une autre direction, car, pour lui les Indiens sont des sous hommes, un peuple inférieur aux Indiens. Il utilise un argument d’autorité pour se justifier, « Satan s’appelle communément le Malin «, « Il peut inspirer à ses partisans toutes les ruses hypocrites. « ici, il s’appuie surtout sur la religion, « Vieille technique de dispute que dénonçait déjà Cicéron,[…] « et se justifie ici par les constatations de Cicéron. Il aimerait que Las Casas s’emporte car il serait plus facile de le faire douter, « un adversaire irascible est plus facile à malmener «. Ils insiste sur l’idée que les Indiens sont des animaux, mais le dit implicitement, « Les chiens et les chevaux aussi. «, mais se rétracte ensuite lorsque Las Casas lui fait la remarque, il se sent donc agressé et dit alors que ce n’est pas ce qu’il a dit, « mes propos sont déformés par mon adversaire. « et semble essayer de se justifier en disant rapidement qu’il ne considère pas le peuple indien comme des animaux mais comme des sous hommes, « Ai-je dit qu’ils étaient des animaux ? «, « Que leur nature n’est pas égale à la notre. «. Il ne sait plus comment convaincre l’assemblée et se met à discuter sur le moindre mot, à les prendre « au pied de la lettre «, « J’ai dit qu’ils sont humains, mais d’une catégorie inférieure. « son discours ne touche pas, il réagi rapidement à la moindre attaque, ce qui ne nous transmet aucun sentiment, il donne l’impression d’un animal à l’affut. Il utilise des phrases interrogatives, des questions oratoires pour se faire appuyer et pour mettre l’accent sur le fait qu’il y est une personne qui l’approuve si il y en a une, ou il attend aussi une réaction de l‘assemblée. Les réponses à ses questions se trouvent déjà à l’intérieur ou tournent en rond, « Ai-je dit qu’ils étaient des animaux ? «. Ses phrases sont hachées, elles semblent sèches, tout comme l’est son discours « J’ai fait simplement remarquer, en observant scrupuleusement toutes les leçons de la logique, que la ruse et la peur des coups ne sont pas, n’ont jamais été l’apanage de l’espèce humaine. «. Sepùlveda veut convaincre l’auditoire et non pas le persuader, il veut que son idée soit acceptée et ne pense pas aux émotions, tout ce qui compte pour lui est la raison, il ne se rend pas compte qu’il est « loin « des personnes constituant l’assemblée.

Les deux discours des de ces deux personnages défendant chacun leur thèse respectives, ne présentent qu’une similitude; celle de la défense de leur thèse. Les discours paraîtraient semblables s’ils étaient tous les deux d’accord sur la même idée, il faut les analyser pour se rendre compte qu’ils sont différents et ne sont pas formés de la même manière. Il faut observer le vocabulaire employé, regarder tous les faits et gestes, on peut ainsi voir que ces deux discours ne suivent pas le même chemin. L’un, tente de toucher les sentiments, ils sont visés, prennent presque la place du récepteur dans la situation de communication, se sont eux qui vont juger le discours adverse, ce sont également eux qui vont aider Las Casas à venir à bout de son but. Son discours touche l’âme, l’intérieur, il a également pu voir les horreurs infligées aux Indiens, il les voit clairement dans son esprit et peut les partager grâce à ses gestes, sa façon de parler et son vocabulaire. Sepùlveda tente de convaincre les personnes, il ne les touche pas, les sentiments ne sont pas visés, les paroles restent des paroles, elles sont comme bloquées derrière un mur, elles restent à l’extérieur n‘ont pas la possibilité de toucher l‘âme du destinataire. Il tente de faire entendre raison à l’assemblée, il croit en son idée, il ne changera pas d’avis, veut aller jusqu’au bout. Il n’y a rien pour juger le discours de Las Casas à celui de Sepùlveda, si les personnes sont influençables elles l’appuieront, si les personnes sont plus sensibles, elles appuieront Las Casas qui est le vainqueur de ce débat. Jean Claude Carrière nous le fait comprendre par la réaction des autres personnes présentent dans la salle, « Une main se lève, une voix demande:[…] «Personne n’adresse la parole au philosophe, il ne demande pas de précision, ce qu’il dit est pour lui indiscutable. Les personnes s’intéressent à ce que dit Las Casas, le lecteur également par la double énonciation.

 

  La persuasion est plus intelligente et est un moyen plus avancé et plus émotionnel pour faire accepter quelque chose à quelqu’un que la conviction. Las Casas est donc le vainqueur de cette partie de la controverse.

 

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