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la conscience de soi est elle utopique?

Publié le 01/04/2005

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conscience
*Qu'en est-il du rapport entre la réflexion et le savoir sur soi ? Dans la première des Méditations métaphysiques, Descartes pousse la réflexion à son extrême dans l'exercice du doute méthodologique et découvre à son terme l'existence de la conscience de soi. L'enchaînement logique « Je doute, donc je pense, donc je suis » signifie que la puissance critique de notre réflexion doit abdiquer devant le fait indubitable de l'existence d'un « je » présent à tous les actes de conscience. *Or, dans la suite du texte, Descartes passe de la découverte d'une conscience de soi singulière à un savoir objectif de soi. En effet, il attribue au « je » la qualité de « substance pensante ». Un tel jugement prétend être un savoir objectif car il se veut universel et nécessaire. Toute conscience de soi, en dehors de son ancrage historique, est une substance pensante. *Un tel passage pose problème. S'il semble répondre à la question de savoir ce que je suis, il ne renseigne en rien sur qui je suis. Or n'est-il pas utopique de nier le rapport essentiel entre une conscience de soi et son histoire ?
  • Analyse :

Conscience et soi : D’après le Vocabulaire critique et technique de la philosophie, la conscience est l’intuition qu’a l’esprit de ses états et de ses actes. Cette faculté rassemble un ensemble d’expériences hétérogènes comme les perceptions, émotions, pensées, volontés et les met en rapport avec une unité permanente et autonome nommée le soi. L’attribution d’expériences à un soi les distingue tout autant qu’elle les relie. Si tout ce qui forme le contenu de ma conscience (mes perceptions, émotions, pensées) m’appartient, je ne peux cependant m’y réduire. Leur diversité et leur instabilité s’opposent à mon unité et ma permanence.

Conscience de soi : la conscience de soi est un contenu de conscience qui se réfère à la réalité d’un soi. Comme tout contenu de conscience, elle est une représentation (image ou idée). De plus elle prétend signifier une réalité. De même l’image ou l’idée d’un arbre formée dans notre représentation semble désigner une réalité objective, hors de nous.

Utopique : Ce terme a son origine dans l’œuvre de Thomas More Utopia. L’auteur y décrit un pays heureux et commandé par un gouvernement idéal. Il a pris dans le langage courant les sens d’imaginaire, fictif, irréel. Le discours utopique s’oppose donc au discours objectif. Ce dernier assure un accord, une adéquation entre la représentation et la réalité. Au contraire, le discours utopique dépasse toujours le réel, ce qui le menace de ne jamais le rejoindre.

L’enjeu d’un tel sujet est d’analyser la possibilité d’un savoir objectif sur soi. La conscience de soi peut-elle être adéquate à la réalité du soi ?

  • Problématique :

A quelles conditions la conscience accède à un savoir objectif sur soi et sur le monde ? Un tel savoir est-il absolument applicable à la réalité du soi ? Autrement dit, une connaissance objective de soi est-elle possible ? Si une telle connaissance s’avère impossible, tout discours sur soi est-il utopique et arbitraire ?

conscience

« * Un tel passage pose problème.

S'il semble répondre à la question de savoir ce que je suis, il ne renseigne en riensur qui je suis.

Or n'est-il pas utopique de nier le rapport essentiel entre une conscience de soi et son histoire ? Quije suis n'est-il pas construit par et contre mon expérience ? 2-Un savoir objectif appliqué à une conscience de soi est utopique.

* Tout savoir objectif suppose la stabilité et l'exhaustivité de son objet.

Il semble que la conscience de soi validecette présupposition en faisant l'expérience de sa permanence.

Le « je » qui sert à me désigner renvoie au même« moi » que je le prononce enfant, adulte ou en fin de vie.

Mais dès que je souhaite lui donner un contenu, le rendreconcret, je dois faire référence à mon histoire et ses ruptures.* Il se peut que j'ai eu tel caractère, tel rôle social ou telles valeurs.

Mais tout a changé au fil des années.Comment interpréter de telles variations dans la représentation de soi ? S'agit-il de modifications qualitatives commecelles causées par des forces extérieures sur un objet ? Dès lors un sujet permanent présent sous tous ceschangements pourrait être pensé et peut-être connu.* Or, pour Bergson, la manière dont la conscience de soi s'inscrit dans le temps est entièrement différente de celled'un objet du savoir.

Dans Matière et Mémoire , Bergson affirme qu' « On chercherait vainement, en effet, à caractériser le souvenir d'un état passé si l'on ne commençait par définir la marque concrète, acceptée par laconscience, de la réalité présente.

».

Expliquons plus en détail comment Bergson conçoit, dans le temps, la capacitéde dédoublement propre à la conscience de soi.

Il est un fait que je n'ai pas accès à ce que j'étais comme je mepercevais, mais à ce que j'étais comme je me perçois.

Lorsque Proust, dans Du côté de chez Swann , relate le souvenir de la lanterne magique ou de la lecture de François le Champi par sa mère, il ne le fait pas avec le regardde l'enfant qu'il était, mais comme l'écrivain qu'il est devenu.Ce fait implique nécessairement que je n'aurai pas accès à ce que je suis comme je me perçois, mais à ce que jesuis comme je me percevrai.* Cette manière pour la conscience d'habiter le temps a deux conséquences immédiates.

Ma conscience n'a pasaccès à un être stable que pourrait désigner le terme « soi ».

N'ayant pas accès à la stabilité d'un objet, elle nepeut prétendre à un savoir objectif sur soi.* Le deuxième présupposé d'un savoir objectif est le don complet de son objet.

Que vaudrait le théorème portantsur un triangle si on lui retirait un angle et un côté ? Or une telle prétention, concernant la conscience de soi a étéremise en cause par la psychanalyse.

Celle-ci révèle, selon le mot de Freud dans Essais de psychanalyse appliquée , que « le moi n'est pas maître dans sa propre maison ».

Une part majeure de l'activité de notre conscience a sonorigine dans l'inconscient auquel le moi n'a pas accès.

Dès la conscience n'est pas transparente à elle-même et nepeut prétendre devenir un objet pour le savoir.

Freud va être amené à concevoir que bon nombre de maladies, mais aussi d'actes quotidiens s'expliquent si l'on admet l'hypothèse de l'inconscient.

Il yaurait en nous u « réservoir » de forces et de désirs (ou pulsions) dont nous n'aurions pas conscience, mais qui agiraient sur nous..

Pour le direbrutalement, en ce sens, l'homme n'agirait pas (ne choisirait pas ses actes etoute connaissance de cause, dans la clarté), mais serait agi (c'est-à-diresubirait, malgré lui, des forces le contraignant à agir) : il ne serait pas« maître dans sa propre maison », il ne serait pas maître de lui. Empruntons à Freud un exemple simple.

Un président de séance, à l'ouverture dit « Je déclare la séance fermée » au lieu de dire « Je déclare la séance ouverte ».

Personne ne peut se méprendre sur ses sentiments ; il préférerait ne pas être là.

Mais ce désir (ne pas assister au colloque) ne peut s'exprimerdirectement, car il heurterait la politesse, les obligations sociales,professionnelles, morales du sujet.

Notre président subit donc deux forcescontraires : l'une parfaitement en accord avec les obligations conscientes,l'autre qui ne l'est pas et qui ne peut s'exprimer directement, ouvertement.Il y a donc conflit, au sein du même homme, entre un désir conscient,conforme aux normes morales et un autre désir plus « gênant ».

Or, dans notre exemple, ce second désir, malgré la volonté de politesse du président,parvient à s'exprimer, mais de façon détournée, anodine : on dira que « sa langue a fourché ». Ici, l'exemple est simple dans la mesure où le président a sans doute parfaitement conscience qu'il ne veut pas être là.

Mais dans bon nombre de cas, quand ma langue fourche, je nesais pas pourquoi, c'est-à-dire que j'ignore moi-même ce qui me pousse à dire tel mot plutôt qu'un autre.

Or pourFreud le cas est exactement identique et s'interprète de même, comme le conflit entre deux désirs dont l'un est gênant et peut être ignoré par le sujet.

Il n'y a pas d'actes innocents ou anodins.

Tous sont révélateurs d'unaffrontement en moi de deux forces.L'hypothèse Freud ienne de l'inconscient revient à dire que bon nombre d'actes « normaux » (oubli, actes manqués, rêves), mais aussi « maladifs », pathologiques (névroses, psychoses, obsessions) s'expliquent en gros selon le même schéma.

L'individu subirait un conflit psychique (dans son âme), conflit parfois extrêmement violent entre les normesconscientes (morales, esthétiques, sociales) et des désirs qui bousculent et négligent ces règles.

Ce second groupede désirs, le sujet les trouverait, s'il en avait conscience, tellement monstrueux, qu'ils ne peuvent parvenir à laconscience que sous une forme voilée, déformée, indirecte : le lapsus, le rêve, ou le symptôme maladif.Le symptôme est donc un compromis entre le désir inconscient et inavouable que je subis, et les normes. »

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