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Kant et la culture

Publié le 03/04/2009

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kant
La culture (cultura) de ses forces naturelles (forces de l'esprit, de l'âme et du corps), comme moyens en vue de toute sorte de fins possibles, est un devoir de l'homme envers lui-même. L'être humain se doit à lui même (comme être rationnel) de ne pas laisser inutilisées et, pour ainsi dire, de ne pas laisser se rouiller les dispositions et facultés naturelles dont sa raison peut un jour faire usage; / au contraire, à supposer qu'il puisse être satisfait de ce qu'il ya d'inné dans sa capacité de prendre en charge ses besoins naturels, il faut cependant que sa raison instruise d'abord par des principes cette satisfaction procurée par le degré plus développé de ses capacités - cela parce que l'être humain, en tant qu'être capable de concevoir des fins (de se proposer des objets comme fins), doit être redevable de l'usage de ses forces, non pas seulement à l'instinct de la nature, mais bien à la liberté, par laquelle il détermine le degré de telles capacités. / Il n'y a donc pas à considérer l'avantage que la culture de sa capacité (en vue de toutes sortes de fins) peut procurer à l'homme, car une telle considération finirait peut-être (selon les principes de Rousseau) par tourner à l'avantage de la grossièreté du besoin naturel; mais c'est un commandement de la raison moralement pratique et un devoir de l'homme envers lui-même que de cultiver ses facultés [...]. E.Kant, Métaphysique des moeurs, II
Eléments d’introduction
-         La culture se présente dès l’Antiquité romaine sous un double visage : elle est culture de la terre (agriculture) et culture de l’esprit (éducation). Elle est donc un acte de transformation, un travail. Par la suite, elle comprend aussi le résultat de ce travail : d’abord, au 16e siècle, les œuvres littéraires (les « humanités «) puis, vers le 19e siècle, l’ensemble du savoir et des modes de pensée et de vie d’une société. Le terme de « culture « est employé aujourd’hui en deux sens distincts (même s’ils sont souvent confondus par l’usage) : il désigne d’abord les œuvres de l’esprit, un certain savoir susceptible d’orienter l’action (on parle d’un homme « cultivé «) puis, par extension, la civilisation. Or ce terme possède un caractère nettement appréciatif, ayant désigné d’abord les modes d’organisation sociale supposés les plus élaborés et les plus raffinés. Il désigne maintenant un ensemble de traits communs à toutes les composantes d’une société.
-         Or c’est précisément la nature et le rôle de la culture que Kant interroge ici dans sa Métaphysique des mœurs (II).
 
Objet du texte
           Il s’agit pour Kant de s’interroger sur la culture en tant qu’il l’a voit comme un devoir pour l’homme conçu comme un être de raison. Il semble en effet que la culture soit le moyen par lequel l’homme développe son humanité au lieu d’en rester à une bestialité originaire. Autrement dit, la culture apparaît dès lors comme une spécificité humaine que l’on doit, de ce fait même, développer. Il y a donc une dimension d’obligation morale qui unit l’homme à la culture.
Problématique
           En quoi la culture apparaît-elle à l’homme comme un devoir non seulement envers lui-même mais envers les autres dans la mesure où le développement de la culture, même si elle est synonyme d’effort, est développement de l’humanité qui est en l’homme (et donc affranchissement de son animalité originaire) ?

 

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« La perfectibilité est une qualité, un attribut bien particulier, car elle n'est pas définie dans l'expression concrètequ'elle va prendre.

Cette expression concrète est en puissance plutôt qu'en acte (pour reprendre la distinctiond'Aristote).

C'est un pur potentiel.

Voilà pourquoi cette faculté est « presque illimitée ».

On ne peut pas savoirjusqu'où elle entraînera l'homme, en particulier au niveau de l'espèce.

Avec la découverte de l'écriture, quipermet une transmission du savoir et notamment technique et scientifique, les progrès dans la manipulation dela matière n'ont, jusqu'à présent, rencontré aucune limite.Cette faculté si particulière, la perfectibilité, est la mère des autres facultés humaines, elle développesuccessivement toutes les autres, en ce sens que les autres facultés en sont l'expression concrète.

C'estparce que l'homme est né indéfini, avec un potentiel ouvert, qu'il a inventé mille manières d'être au monde etqu'il s'est forgé un monde culturel et social qui n'a plus rien à voir avec le monde naturel.

Ainsi on peut définirl'homme comme l'être qui est né non déterminé, un « avorton » resté au stade fœtal, à la différence des autresêtres vivants, nés terminés, déterminés par l'instinct à des comportements précis.

Cette indétermination del'homme lui permet d'être réceptif à la culture et à l'accumulation du savoir qu'elle représente.

En ce sens onpeut dire que la culture peut être libératrice au sens où elle donne les moyens à ce manque d'instinct naturelde se transformer en qualité d'exception qui va faire de l'homme un animal à part.

la culture est libératrice dansla mesure où elle offre à l'homme les conditions de possibilité d'une émancipation de sa propre part d'animalitéen lui à la faveur d'un développement de sa part d'humanité.

Si l'homme manque d'instinct c'est d'abord etavant tout parce qu'il est un être doué de raison, c'est-à-dire capable de se donner à lui-même ses propresfins, autrement dit de constituer un véritable projet.Et c'est parce que la culture apparaît comme l'expression de l'humanité en l'homme, ce par quoi tout progrèsest possible, qu'elle est dès lors conçue comme un devoir : si c'est par la culture que l'homme se distingue del'animal et acquiert sa spécificité, alors c'est un devoir pour l'homme que de développer ses facultés naturelleset de les élever par la culture. - 2e MOUVEMENT « Au contraire, à supposer qu'il puisse être satisfait de ce qu'il y a d'inné dans sa capacité de prendre en charge ses besoins naturels, il faut cependant que sa raison instruise d'abord par des principes cette satisfactionprocurée par le degré plus développé de ses capacités - cela parce que l'être humain, en tant qu'être capable deconcevoir des fins (de se proposer des objets comme fins), doit être redevable de l'usage de ses forces, non passeulement à l'instinct de la nature, mais bien à la liberté, par laquelle il détermine le degré de telles capacités.

» Il apparaît cependant que l'homme peut parfois se satisfaire de ce qu'il a déjà accompli ou de ce que la naturelui a donné.

Cependant, c'est la raison qui est en l'homme qui doit toujours rester le principe organisateur detoutes ses conduites.En réalité, cette capacité naturelle, innée, qu'a l'homme de « prendre en charge ses besoins naturels », c'est-à-dire encore de se donner à soi-même ses propres fins (à savoir concevoir un projet et appliquer les moyenspropre à le réaliser) n'est pas tant l'effet d'un don de la nature en elle-même mais bien plutôt l'expression de saliberté.La culture apparaît alors comme un devoir non seulement parce qu'elle est le signe de la raison en l'homme (paropposition à l'instinct en l'animal) mais aussi, et fondamentalement parce qu'elle est l'expression de la liberté del'homme (ce que témoigne encore la présence de la raison).Pour ne pas s'étioler dans un rapport stérile, morne, et infécond de l'homme au monde, la culture se doit derester toujours dynamique et créatrice.

Pour ce faire, et pour éviter du même qu'elle ne dérive vers satendance inhérente à la barbarie, elle doit elle-même être cultivée.

L'on se doit, en tant qu'homme, en tantqu'il y a une humanité en nous (qui est toujours en devenir), de créer les conditions d'épanouissement de laculture.

La culture doit être l'objet d'une vigilance extrême puisqu'elle est ce par quoi l'homme va se libérer (etde l'animalité et de l'objectivité qui fait souffrir), soit ce par quoi il va s'aliéner lui-même (dans une dérivepathologique, mais intrinsèque à toute culture).

C'est parce qu'elle est capable d'aboutir à ces deux dimensionsopposées, que l'humain se doit – et c'est un devoir envers lui-même et envers l'humanité tout entière – decréer les conditions de l'épanouissement dynamique de la culture. - 3e MOUVEMENT « Il n'y a donc pas à considérer l'avantage que la culture de sa capacité (en vue de toutes sortes de fins) peut procurer à l'homme, car une telle considération finirait peut-être (selon les principes de Rousseau) par tourner àl'avantage de la grossièreté du besoin naturel; mais c'est un commandement de la raison moralement pratique etun devoir de l'homme envers lui-même que de cultiver ses facultés [...] » C'est d'ailleurs dans cette perspective que l'on pourrait reprendre l'analyse kantienne de l'éducation, qui estperçu comme une obligation morale, considérée sous l'angle de l'activité providentielle : selon Kant , la nature a voulu que l'homme conquière sa liberté dans la culture, c'est-à-dire en développant ses virtualités par letravail ; une obligation morale car c'est un devoir de l'homme envers lui-même de développer ses facultés,sans lesquelles il resterait inachevé.

Dès lors, le devoir d'éducation pourrait être conçue – sinon vécue – non. »

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