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Espagne, guerre d'

Publié le 19/02/2013

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espagne

1   PRÉSENTATION

Espagne, guerre d' (1936-1939), guerre civile qui a opposé le gouvernement républicain espagnol du Front populaire (Frente popular) à une insurrection militaire et nationaliste dirigée par le général Franco.

2   LES ORIGINES
2.1   Une société aux divisions archaïques

Aux origines du conflit, on peut noter la persistance, dans l’Espagne du premier tiers du XXe siècle, de structures économiques et sociales archaïques. La classe des grands propriétaires terriens possédant des latifundia (voir structure agraire), souvent nobles, domine un pays resté essentiellement agricole. Cette haute société s’appuie sur un clergé catholique très riche, et dans l’ensemble très conservateur. Elle s’appuie également sur une armée dont les très nombreux officiers défendent l’ordre traditionnel. Elle s’intéresse peu au développement industriel, les secteurs les plus rentables étant entre les mains de capitaux étrangers.

Face à cela, les deux tiers des actifs sont des agriculteurs, et les trois quarts de ces derniers constituent un prolétariat agricole sous-payé. Quant aux ouvriers des mines (Asturies) ou de l’industrie (Catalogne), ils mènent des luttes nombreuses et violentes pour combattre le chômage et les bas salaires résultant de la concurrence des pays plus avancés. Les catégories intermédiaires sont peu nombreuses, mais fournissent beaucoup de cadres et de théoriciens aux partis de gauche.

2.2   La montée des tensions sociales

Avec la seconde République espagnole, dont la naissance en 1931 s’accompagne de violentes manifestations populaires anticléricales, une alliance de socialistes modérés et de républicains tente de mettre en application un vaste programme de réformes : réforme agraire (15 septembre 1932), retraite anticipée offerte aux officiers, séparation de l’Église et de l’État, droit de vote accordé aux femmes, autorisation du divorce par consentement mutuel, abolition des titres de noblesse, autonomie relative à la Catalogne, enseignement pour tous.

Mais la coalition au pouvoir se divise bientôt sur fond de grèves, de violences antireligieuses menées le plus souvent par les militants anarchistes de la Confédération nationale du travail (Confederación nacional del trabajo, CNT) et de révoltes de droite (tentative de putsch du général Sanjurjo, août 1932) comme de gauche. Aussi les socialistes se lancent-ils seuls dans la campagne pour les élections législatives de novembre 1933 en espérant pouvoir former un gouvernement exclusivement socialiste.

Dans un système qui favorise les coalitions, ils ouvrent ainsi la voie à la victoire d’une alliance des partis de droite qui se sont réorganisés (par exemple les Juntes d’offensive national-syndicaliste — Juntas ofensiva nacional-sindicalista, JONS —, créées en 1931 par Ramiro Ledesma Ramos, ou la Phalange fondée en 1933). Pendant toute l’année 1934, les Cortes, dominés par les conservateurs, abolissent ou freinent les réformes de 1931-1932. Des révoltes éparses s’ensuivent (Madrid, région de Valence, etc.).

Craignant que l’entrée au gouvernement de la coalition appelée Confédération espagnole des droites autonomes (Confedéración española de derechas autónomas, CEDA), groupant la plupart des partis de droite et les catholiques, sous la direction de José Maria Gil Robles, en octobre 1934, n’annonce la mise en place d’un régime autoritaire, les socialistes, les anarchistes et les communistes se soulèvent vainement à Madrid et à Barcelone, mais prennent le contrôle des régions minières des Asturies et fondent une éphémère « République socialiste «. Peu après cependant, ce mouvement est réprimé dans le sang par les légionnaires et les unités marocaines sous le commandement du général Francisco Franco. Cette répression, extrêmement brutale (1 300 tués, 3 000 blessés, 30 000 arrestations) entraîne les protestations de tous les partis de gauche.

2.3   La victoire du Front populaire

La gauche parvient peu à peu à s'unir dès la fin de 1935. En janvier 1936, un « plan politique commun « est signé entre les républicains modérés emmenés par Manuel Azaña y Díaz, les partis de gauche (notamment socialistes et communistes) et les autonomistes catalans. Le Front populaire (Frente popular) voit ainsi le jour et son programme demeure extrêmement modéré, réclamant surtout l'amnistie pour les prisonniers politiques, et plus particulièrement ceux emprisonnés pour avoir participé à la révolte des Asturies. Les anarchistes de la CNT s'étant pour la première fois abstenus de lancer leur habituelle consigne de boycottage des élections, apportant ainsi indirectement leur soutien au Front populaire, ce dernier remporte les élections du 16 février 1936, ce qui lui permet de reprendre le programme de réformes de 1931, tandis que dans le pays se produit une flambée révolutionnaire (occupation de terres, d’usines, pillages, grèves, libération de détenus, incendies de séminaires, de monastères et d’églises).

La droite, inquiète, se prépare alors à la guerre. Une conspiration militaire est mise au point par le général Emilio Mola. Les escadrons de la terreur du parti fasciste en pleine expansion, la Phalange espagnole, provoquent une véritable escalade de la violence et des désordres, dans le but de justifier une intervention militaire. Les représailles de la gauche atteignent leur paroxysme avec l’assassinat, le 13 juillet 1936, du responsable du parti monarchiste, José Calvo Sotelo, par des gardes d’assaut, les forces de sécurité républicaine. C’est à ce moment-là que le général Franco décide de participer à la conspiration.

2.4   Le Pronunciamiento de juillet 1936

Le 17 juillet 1936, le général Sanjurjo, l’initiateur du complot réfugié au Portugal, auquel se sont joints le général Mola, commandant en chef des armées du Maroc espagnol devenu gouverneur de Pampelune, et le général Franco, chef du commandement général des Canaries, se rendent maîtres du Maroc, des Canaries et des Baléares. Le lendemain, Franco, arrivé au Maroc, prend le commandement des forces insurgées du sud de la Péninsule, et l’insurrection militaire gagne les garnisons à travers toute l’Espagne.

Le soulèvement du 18 juillet réussit dans les capitales des provinces rurales du León et de Vieille-Castille, dans des villes telles que Burgos, Salamanque et Ávila, mais il est mis en échec par les ouvriers de Madrid, Barcelone et de la plupart des villes industrielles du Nord. Inversement, dans le Sud, les zones rurales restent à gauche, mais, dans les principales villes comme Cadix, Séville et Grenade, la résistance de la classe ouvrière est réprimée dans le sang.

Les rebelles nationalistes, qui comprennent la majorité des catholiques, l’Église, les conservateurs et les monarchistes, contrôlent dès le 21 juillet plus de 40 p. 100 de l’Espagne, dont la Galice, le León, la Vieille-Castille, l’Aragon et certaines parties d’Estrémadure ainsi qu’une zone plus petite en Andalousie, entre Huelva, Séville et Cordoue. Ils peuvent compter sur 95 p. 100 des officiers, suivis par 80 p. 100 de leurs soldats, et sur 75 à 90 p. 100 des hauts fonctionnaires nationaux ou locaux. De plus, ils contrôlent les deux tiers de la production agricole. La junte de gouvernement militaire s’établit le 26 juillet à Burgos. Le gouvernement républicain, lui, peut compter sur la majorité de l'aviation, sur une partie importante des marins, sur les forces de polices, sur les gardes d'assaut et sur les carabiniers. Les nationalistes catalans et basques se sont également ralliés à lui. Enfin, les républicains possèdent 80 p. 100 de la production industrielle.

Les rebelles se trouvent cependant confrontés à un problème inattendu. Face à des milices de travailleurs sans entraînement, ils peuvent s’appuyer sur une armée de soldats professionnels, sous le commandement du général Franco. Mais cette armée est bloquée au Maroc par les navires, dont les équipages républicains se sont mutinés contre leurs officiers de droite. Les rebelles demandent alors de l’aide à l’étranger. Hitler et Mussolini décident de fournir des avions de transport de troupes afin de permettre le rapatriement à Séville des troupes du Maroc. Cinquante mille hommes sont amenés en Espagne en dix jours et le coup d’État manqué se transforme en guerre civile sanglante.

La République, en revanche, ne reçoit pratiquement aucune aide lorsqu’elle se tourne vers les puissances démocratiques. Paralysé par son opposition et par la crainte des Britanniques devant une guerre généralisée, le président du Conseil français Léon Blum renonce à aider la République. Le pacte de « non-intervention «, proposé le 1er août par ce dernier aux pays européens, est signé le 28 août 1936, alors que les nazis et les fascistes italiens, signataires de l’accord, ont déjà commencé à le bafouer. Seuls la France et le Royaume-Uni — qui accueille à Londres les vingt-neuf membres de la « commission de non-intervention « — respectent leur engagement. Le gouvernement de Madrid est contraint de se tourner vers l’Union soviétique, qui fournit aux républicains des techniciens, de l’armement et de l’argent.

3   LA GUERRE CIVILE
3.1   Progrès de Franco
3.1.1   Affirmation de Franco

Les rebelles nationalistes lancent alors deux campagnes qui améliorent sensiblement leurs positions. Mola attaque la province basque de Guipúzcoa pour l’isoler de la France. Parallèlement, l’armée de Franco (divisions marocaines et gardes civiles) avance vers le nord en direction de Madrid, causant des massacres sur son passage, notamment celui de 2 000 prisonniers à Badajoz prise le 14 août par le général Yagüe. Les deux blocs de l’Espagne nationaliste font leur jonction après cette victoire, le 3 septembre. Ils consolident leurs positions pendant les mois d’août et de septembre. Les troupes franquistes du général José Enrique Varela rejoignent Séville, Cordoue, Grenade et Cadix.

Les républicains n’arrivent pas à obtenir d’aussi bons résultats. En effet, les colonnes de miliciens républicains restent bloquées par le siège de la garnison rebelle retranchée dans la forteresse de l’Alcazar à Tolède et des villes d’Oviedo et de Saragosse, qui sont rapidement tombées aux mains des rebelles.

Le 21 septembre 1936, sur un aérodrome près de Salamanque, les généraux rebelles, à l’exception du général Sanjurjo, mort dans un accident d’avion, choisissent Franco comme généralissime pour des raisons militaires évidentes, mais aussi pour faciliter leurs relations avec Hitler et Mussolini. Le même jour, Franco lance ses forces au sud-est de Madrid pour libérer la garnison de Tolède (27 septembre 1936), perdant une excellente occasion d’attaquer la capitale dont les défenses ne sont pas prêtes. Mais cela lui permet de renforcer son pouvoir en remportant une victoire retentissante et de se faire reconnaître comme chef de la rébellion nationaliste.

Franco ralentit donc le rythme de la guerre de manière à procéder à une purge politique massive dans les territoires occupés. Confirmé comme Caudillo et chef d’État, le 1er octobre 1936, avec tous les pouvoirs (à vie à partir de 1938), il impose l’unité en obligeant les différentes tendances, notamment les phalangistes à se fondre dans un mouvement politique officiel, et en mettant au pas les carlistes. Il contrôle alors une zone très centralisée. En revanche, la République est, elle, empêtrée dans d’importantes divisions entre communistes et socialistes modérés, qui font de la victoire militaire leur priorité, et les anarchistes, trotskistes et socialistes d’extrême gauche, qui sont davantage préoccupés par la révolution sociale et s’efforcent de développer le mouvement de collectivisation des terres et des usines notamment en Catalogne et en Aragon, pensant que celle-ci stimulera la défense.

3.1.2   Le contournement de l’obstacle madrilène

Le 7 octobre, l’armée d’Afrique reprend sa marche sur une capitale envahie de réfugiés et où sévit une pénurie de nourriture et d’eau. Le retard de Franco permet de réorganiser la défense de Madrid grâce aux armes envoyées d’Union soviétique (chars et avions) et aux colonnes de volontaires, arrivées du monde entier, les Brigades internationales.

Toutefois, le 6 novembre, le gouvernement se réfugie à Valence, laissant Madrid sous le commandement du général José Miaja. Soutenu par les Juntas de defensa contrôlées par les communistes, celui-ci rallie la population, laissant la stratégie militaire à la charge de son chef d’état-major, le colonel Vicente Rojo. Même s’il peut faire appel aux unités allemandes spécialisées de la légion Condor, Franco doit accepter son échec à la fin du mois de novembre 1936. La ville tiendra vingt-huit mois supplémentaires.

Franco s’efforce alors d’encercler la capitale. Lors des batailles de Boadilla (décembre 1936), du Jarama (février 1937) et de Guadalajara (mars 1937), ses troupes sont repoussées, mais au prix de nombreuses victimes chez les républicains. Malgré la défaite de Guadalajara, où les forces italiennes sont écrasées par les Brigades internationales, ce qui met en échec le plan de Franco de couper en deux la zone tenue par les républicains, les nationalistes détiennent toujours l’avantage, ce que démontre une série de victoires qui leur permet de prendre le contrôle du nord de l’Espagne, au printemps et à l’été 1937.

La conquête du Nord par les franquistes commence en mars, lorsque 40 000 hommes, placés sous le commandement du général Mola, avancent dans un Pays basque démoralisé par l’efficacité des bombardements effectués par les aviateurs allemands de la légion Condor. Ils détruisent ainsi, sous un déluge de bombe, la ville de Guernica, le 26 avril 1937, jour de marché où les habitants des alentours sont venus nombreux. Cette destruction, qui fait plus de 1 500 victimes et provoque une énorme émotion dans l'opinion internationale, ce dont témoigne le tableau de Picasso (Guernica), galvanise la résistance du peuple basque et il faut deux mois aux franquistes pour franchir la trentaine de kilomètres qui séparent Guernica de Bilbao, la capitale, qui tombe le 19 juin. Ensuite, l’armée nationaliste, bien fournie en soldats et en matériel italiens, prend le contrôle de Santander le 25 août. Les Asturies connaissent le même sort au cours du mois de septembre et tombent définitivement le 21 octobre. Une répression féroce s’y abat.

L’industrie (camions Ford entre autres) et les ressources minières du Nord sont maintenant aux mains des rebelles — avantage décisif qui vient s’ajouter à leur supériorité en hommes, en chars et en avions ainsi qu’à la maîtrise de la majeure partie de la péninsule Ibérique, en particulier de la frontière portugaise, essentielle pour l’approvisionnement.

3.1.3   La situation à l’été 1937

À partir de l’été 1936, dans la zone nationaliste, les massacres de républicains de tous bords se succèdent, à la fois sur directive militaire officielle et sur initiatives locales. Le poète Federico García Lorca, fusillé aux premières heures de la guerre civile, reste l’exemple le plus célèbre. Les réfugiés aisés des zones républicaines trouvent facilement leur place dans la zone franquiste. Les volontaires étrangers (20 000 Portugais, jusqu’à 70 000 Italiens en 1937, 16 000 professionnels allemands par groupes successifs) ne manquent pas, de même que le matériel (1 000 avions italiens et allemands, 10 000 mitrailleuses italiennes, 100 000 fusils italiens, 136 Messerschmitt-109 à partir de mars 1937, etc.).

Dans la zone républicaine où ont également lieu, de juillet 1936 à mars 1937, des massacres massifs (7 000 à 8 000 prêtres, 2 000 phalangistes, dont le fondateur de la Phalange, José Antonio Primo de Rivera, qui deviendra un martyr sous le régime franquiste, 3 000 adhérents du syndicat agricole confessionnel, prisonniers, suspects, etc.), l’atmosphère est beaucoup moins euphorique. Les soutiens en matériel, surtout soviétiques (650 à 700 chars, 1 500 à 2 500 pièces d’artillerie, 100 000 fusils, 700 chasseurs, etc.), sont insuffisants et si les Brigades internationales constituent un renfort de valeur, les miliciens, qui pâtissent d’un encadrement insuffisant, ne s’aguerrissent que progressivement.

Par ailleurs, le clivage se renforce entre les anarchistes, le Parti ouvrier d’unification marxiste (POUM) et les socialistes de gauche — menés par Francisco Largo Caballero — partisans de la révolution sociale, et les modérés (gauche bourgeoise de Manuel Azaña y Díaz, socialistes réformistes, communistes), dont la priorité est de gagner la guerre dans un État acceptable par les puissances démocratiques.

Le remplacement, en mai 1937, du gouvernement présidé par Largo Caballero par celui du socialiste Juan Negrín conclut la période d’écrasement par les armes du courant révolutionnaire (exclusion du POUM du gouvernement au printemps 1937, et dissolution en juin 1937 après son soulèvement avec les anarchistes à Barcelone : 400 tués et 1 000 blessés en avril 1937). Une véritable terreur, avec tribunaux politiques et exécutions, est alors mise en place par les communistes avec le soutien d’experts russes du commissariat du peuple aux Affaires intérieures (NKVD), non plus contre les phalangistes, mais contre l’extrême gauche indépendante (exécution d’Andres Nin, chef trotskiste du POUM). Dans le même temps, des unités militaires communistes mettent fin par la force à l’expérience de collectivisation des terres en Aragon.

Ces conflits internes, de même que le rétrécissement du territoire, expliquent une certaine dégradation de l’assise populaire du pouvoir républicain. Et cela d’autant plus que les difficultés de ravitaillement sont grandes, particulièrement à Madrid, et que les prix des denrées, bloqués en principe, grimpent.

3.2   Agonie de la République
3.2.1   La défaite de Teruel

Les républicains essaient de résister à l’inexorable avancée des franquistes par une série d’offensives. À Brunete, à l’ouest de Madrid, le 6 juillet 1937, 50 000 hommes forcent les lignes ennemies, mais les nationalistes disposent de suffisamment de renforts pour pouvoir contenir le flot. Pendant dix jours, dans ce qui est l’une des batailles les plus meurtrières de la guerre, les républicains sont pilonnés par des attaques aériennes et par l’artillerie. C’est au prix de pertes très élevées qu’ils réussissent à différer la chute du Pays basque. En août 1937, ils lancent une offensive risquée contre Saragosse, dans la ville de Belchite, offensive qui est arrêtée en moins de trois semaines.

Dans toutes leurs initiatives, les républicains réussissent à gagner un peu de terrain, mais ils n’ont pas la force nécessaire pour asséner de coup fatal. C’est le cas, en décembre 1937, lorsqu’ils lancent une autre offensive préventive contre Teruel dans l’espoir de détourner une fois de plus Franco de Madrid. Par une température glaciale, ils prennent le contrôle de Teruel le 9 janvier, mais ils sont délogés après six semaines de bombardements intenses. Une fois encore, ils doivent battre en retraite, le 22 février 1938. Le nombre de victimes des deux côtés est particulièrement élevé.

3.2.2   L’Espagne républicaine coupée en deux

Les nationalistes exploitent alors l’épuisement des républicains pour lancer une grande offensive en Aragon et en Castille en direction de la Méditerranée. Le 7 mars 1938, 100 000 hommes, 200 chars et près de 1 000 avions allemands et italiens partent à l'assaut. Les républicains manquent d’armes et de munitions. De plus, ils sont démoralisés après la reprise de Teruel. Les forces de Franco descendent la vallée de l’Èbre, coupant la Catalogne du reste de la République et atteignent la mer le 15 avril.

3.2.3   De l’Ebre à Madrid : la fin de la République

En juillet, Franco s’arrête aux portes de Barcelone, qu’il décide de ne pas attaquer, préférant mener une campagne de grande envergure sur Valence. Les républicains se défendent avec acharnement, mais en vain. Le 23 juillet 1938, les nationalistes se trouvent à moins de 40 km de Valence. En désespoir de cause, Rojo lance une grande offensive de diversion sur l’Èbre afin d’essayer de rétablir un point de contact avec la Catalogne. Ses forces atteignent Gandesa, à près de 40 km, mais elles sont bloquées par les renforts nationalistes. Malgré le peu d’importance stratégique du territoire qui a été pris, Franco, déterminé à détruire l’armée républicaine, se lance dans une guerre d’usure qui dure trois mois.

À la mi-novembre, au prix de pertes humaines considérables des deux côtés, les républicains sont chassés du territoire qu’ils ont pris en juillet. La République est alors pratiquement vaincue.

À la fin du mois de novembre commence l’offensive contre Barcelone, qui tombe le 26 janvier 1939. Negrín, toujours soutenu par les communistes, poursuit ses efforts pour organiser la résistance. À Madrid, le 5 mars, le commandant de l’armée républicaine du Centre, le colonel Segismundo Casado, avec le général Miaja, forment une junte qui le renverse. Cette junte constitue un Conseil de défense dont les tentatives de paix négociée sont rejetées par Franco. Après une « petite guerre civile « dans la guerre civile où la junte combat l’opposition communiste, les forces républicaines commencent à se rendre progressivement. Les nationalistes entrent dans une capitale en état de choc, le 27 mars. Quatre cent mille républicains doivent prendre le chemin de l’exil pour la France, où ils sont rassemblés dans des camps.

4   BILAN DE LA GUERRE

Le 31 mars 1939, les nationalistes ont conquis la totalité du territoire espagnol. Une dictature qui durera trente-huit années s’installe dans une Espagne ruinée.

Selon les estimations les plus modérées, les pertes militaires directes, les exécutions dans les deux camps, les victimes des bombardements aériens se chiffrent à un total d’au moins 350 000 personnes. En outre, 200 000 exécutions ont eu lieu de 1939 à 1943, tandis que des milliers de prisonniers de guerre sont restés jusque-là dans des camps ou des unités disciplinaires. Par ailleurs, 400 000 républicains se sont exilés, principalement en France et en Amérique du Sud.

Les cadres de l’opposition républicaine exilés ou morts, le pays ravagé, une Europe qui prépare la guerre, du Royaume-Uni à l’Union soviétique, sont autant d’atouts pour Franco, lui permettant de construire une dictature durable, qu’il saura préserver de trop de compromissions avec Hitler.

Suscitant un fort élan de soutien international, la cause des républicains espagnols a donné lieu à une intense production artistique et littéraire. Par l'ampleur de cette production, la guerre d'Espagne apparaît ainsi comme le premier conflit où l'art a été aussi intensément mis au service de la propagande et de la défense d'une cause. Outre le fameux tableau de Picasso, Guernica, présenté à l'Exposition universelle de Paris, en 1937, « l'illusion lyrique «, dont parlait Malraux à propos de la guerre d'Espagne, s'est d'abord exprimée au cinéma. La lutte des républicains espagnols a ainsi suscité plus de 500 films, dont les quatre cinquièmes réalisés pendant le conflit. Parmi les plus célèbres, il faut noter l'Espoir et Pour qui sonne le glas, tous deux tirés des romans du même nom, le premier écrit par André Malraux, le second par Ernest Hemingway. Plus récemment, Ken Loach a réalisé un film inspiré de l’histoire du POUM (Land and Freedom, 1995). De très nombreux témoignages ont également été publiés dont celui de George Orwell, Hommage à la Catalogne, récit des mois qu'il a passés comme combattant parmi les miliciens du POUM, et celui de Georges Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, dénonciation par un écrivain catholique, de la répression franquiste.

La défaite des républicains est une leçon pour les démocraties qui se sont laissé berner par une « non-intervention « (accord signé le 28 août 1936) fonctionnant, en fait, à sens unique (frontière française fermée, mais approvisionnements nationalistes transitant par le Portugal ; navires allemands ou italiens arraisonnant les navires de commerce selon leur destination). Elle contribue à mobiliser les Alliés contre le nazisme, en leur donnant une idée du sort qui les attend en cas de victoire allemande.

La guerre d’Espagne a enfin été le champ d’expérimentation des armes et des techniques nouvelles, en particulier dans le domaine de l’aviation, qui allaient être employées pendant la Seconde Guerre mondiale.

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