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éducation à la lecture, lectures éducatives, 3 exemples du XVIIIème siècle

Publié le 18/02/2013

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Education à la lecture, lectures éducatives Si l'on considère le XVIIIe comme étant le siècle de découverte du sentiment de l'enfance, ce dernier est alors considéré dans son individualité propre et non plus comme un « adulte en miniature « dont la seule fonction est de perpétuer la lignée familiale. L'intérêt pour les questions d'éducation se manifeste alors plus qu'auparavant. L'article « Education « de l'Encyclopédie met en exergue l'importance de l'éducation dans la préparation des jeunes gens à sortir de leurs naïves chimères afin de rentrer dans le monde en s'adaptant à la réalité, la personnalité de l'individu doit alors être formée pour affronter le monde. Si on lie cette préoccupation nouvelle avec la diffusion de l'imprimé, alors en plein expansion, quelle part prend-t-il alors dans la constitution du jeune individu ? Les débats qui s'articulent autour de la fiction (en particulier romanesque) tendent tour à tour à la dénigrer, au motif qu'elle est dangereux véhicule d'illusions mensongères, ou à l'exalter ; le roman « apparaît comme un objet important, au confluent des savoirs, du pouvoir, et encore une fois du plaisir «. Si l'objet livre se diffuse particulièrement, quels type de rapport la fiction en vogue tisse-t-elle alors aux individus-lecteurs ? Quelle place prend la lecture dans l'éducation de l'enfant ? Nous nous intéresserons ici à la figure de l'enfant (au sens large, qui n'a pas fait son entrée dans le monde) dans ses rapports à la littérature appréhendés à travers des diégèse exhibant des personnages tant réels , dans l'autobiographie ,par des rapports de causalité qu'ils attribuent entre leurs lectures et leurs propres expériences, que fictifs : aux liens que les auteurs tissent entre la littérature et la vie, par l'intermédiaire de leurs personnages. Pour ce faire, nous nous pencherons dans un premier temps sur les questions d'apprentissages de la technique de lecture, à travers Sir Walter Finch et son fils William (1806) d' Isabelle de Charrière, puis sur le rapport sensible de découverte de la littérature par le jeune Rétif de la Bretonne , dans Monsieur Nicolas (1794) ; enfin, sur l'interprétation et le détournement quichottien de Marmontel dans le Mari Sylphe.( 1754) Isabelle de Charrière : Sir Walter Finch et son fils William , ou de l'apprentissage technique de la lecture Cette oeuvre se présente sous la forme d'un journal, d'un « carnet « tenu par un jeune père dès la naissance de son fils, enrichi de mois en année pendant vingt ans, jusqu'à devenir « gros cahier «p. 562. Destiné dès l'origine, (si l'on s'en réfère aux fréquentes interpellations) à cet enfant dont la survie est incertaine, ce journal explicitera tant les choix de Sir Walter Finch que ses doutes sur l'éducation de William, bel et bien vivant mais orphelin de mère. L'énonciation de ses résolutions, liées aux choix même de vie du lord, s'accompagneront, au fil du texte, d'explicitations sur sa propre jeunesse, en parallèle aux remarques sur l'évolution de l'enfant. C'est donc une sorte de testament affectif et éducatif préparé et suivi par un père en vue de l'entrée de son fils dans le monde : « Mon fils, si je continue, comme je n'en doute pas , cette histoire de votre enfance et de votre éducation, jeune encore vous la lirez, et il ne sera pas trop tard, à ce que j'espère, pour que vous puissiez réparer mes fautes, et suppléer à ce que j'aurai pu négliger. « p 528 En outre, le lord reconnait que l'hérédité n'a que peu avoir avec les capacités intellectuelles (ainsi que le disait l'arrière-petit-fils de Grotius ) ou les aspirations personnelles ; fervent partisan de la liberté, il écrit : « tu aimeras, mon fils, ce qu'il te plaira sans que je m'en formalise, tu feras même à Ivy Hall, moi vivant, tous les essais de culture que tu voudras «p 527. Se préparant ainsi, alors que William n'a que cinq ans, à ne pas le contraindre à embrasser une voie qu'il aurait tracé pour lui, Sir Walter se refuse à suivre le modèle de son propre père, l'ayant poussé tout d'abord à une carrière -d'ecclésiastique- puis l'ayant enjoins à y renoncer pour un mariage qui l'a tout autant privé de sa liberté. En ce qui concerne l'éducation par la lecture, elle est évoquée bien avant de concerner le jeune William. Sir Walter et sa défunte épouse avaient effectivement déjà un lien privilégié avec la littérature. Ainsi, la mère de William a été en partie éduquée à l'aide des lectures que lui fournissait Lady C. Quant au lord, malgré un père peu érudit, qui, selon ses dires, « se fatiguait peu à penser «p 524, ne peut s'éloigner de ses lectures. Apercevant, dans ses jeunes années, une femme dont il s'éprend, il la décrit à son ami par analogie littéraire : « Pour vous donner une idée un peu distincte, pensez qu'elle ressemble à Clarisse Harlowe et à Julie d'Etranges «p. 526. Fuyant les femmes, il n'aura de cesse de rêver à cette incarnation romanesque. Homme de devoirs, fuyant les mondanités, lecteur de Richardson, de Rousseau ou d'Horace, -ouvrage dont il déplore la dévoration par le chien de son épouse-, Sir Walter admet : « dans le fond je n'aime que les livres. Ma bibliothèque et mon parc avec un livre, voilà où je suis bien. « p 527. Il semble être en effet un véritable bibliophile, n'écrivant rien dans son carnet pendant près de six mois (Décembre 1780-Juin 1781), il a relu durant l'hiver ses « classiques grecs et latins. « p. 529. L'utilisation du terme « classiques « est ici ambivalente : sa bibliothèque est-elle personnelle ou n'est-elle que le résidu de sa scolarité, au cours de laquelle on lui a indiqué ces dits « classiques «, dont la lecture est nécessaire pour un homme de son rang ? Autrement dit, est-elle l'opération d'une volonté libre ou résultat d'un devoir ? De même, si le romanesque l'a poussé au fantasme amoureux, quel type de rapports entretient-il avec la littérature et cherchera-t-il à transmettre à son fils ? En effet, en parallèle à la volonté de laisser son fils libre de ses aspirations, Sir Walter s'interroge : « que risque-ton de leur donner les habitudes dont on s'est trouvé bien soi-même ? « p 529 Ayant laissé le jeune lord en nourrice chez laquelle il côtoie plusieurs frères et soeurs de lait, Sir Finch, pourvoira également à l'éducation de ces derniers. Ainsi, de l'apprentissage de la lecture de John et Tom, William, qui est plus jeune, retient en dilettante, quelques lettres de l'alphabet. John, sachant lire, « feuillette tout ce qu'il trouve : le Calendrier de la Cour, la Gazette, Pope, Parnell, Hume. «. p 532. Plus âgé que William, plus éveillé mais aussi d'une curiosité accrue, John pose plus de questions que le petit master ; ainsi, il s'interroge face à la di...

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