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Discuter cette assertion de V. Hugo (Préface de Cromwell) : Tout ce qui est dans la Mature est dans l'Art.

Publié le 17/02/2012

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hugo

La question que Victor Hugo semble trancher ici avec une intrépide assurance, est vieille comme Fart lui-même. Elle se posa dès le jour où un homme, pour exprimer la beauté des choses, prit en main un pinceau, tin ciseau ou une plume. « Quel rapport, se demanda-t-il, dois-je établir entre la nature dont je m'inspire et l'image que j'en vais donner à mes semblables, si je veux qu'ils partagent mon admiration? « Les siècles, et, dans un même siècle, les « écoles « antagonistes, ont répondu très différemment à cette question....

hugo

« Voila, croyons-nous, comment it faut apprecier cette assertion en fonc- tion de Victor Hugo.

Mais on pent la discuter theoriquement et historique- ment; c'est a quoi nous allons maintenant nous essayer. Que faut-il, d'abord, entendre par Nature? Est-ce le monde reel, tel apparait A nos sens a un moment donne?...

Si oui, cette realite sensible est-elle toujours saisissable?...

II est des Rats transitoires, accidentels de la realite, des details qui echappent au pinceau, au ciseau, a la description. 11 existe une petite fleur appelee « le Desespoir du peintre »; on pourrait leur donner a toutes ce nom.

Ce que l'artiste vent saisir et imiter ne peut etre la nature visible et mobile.

S'il s'y arrete, le type, l'esprit, ridee qui se cachent sous un aspect fugace lui echappent.

La realite n'est pas toujours dans les apparences; la nature vraie ne se traduit pas necessairement dans un seul jeu de physionomie, dans un seul geste, dans une seule parole. L'artiste doit done s'attacher a la nature generale et permanente, qui n'est pas toujours visible, mais que raft, precisement, sait decouvrir, de- voiler, fixer.

Ceci exige chez l'artiste un regard profond, un don de divi- nation qui lui permet d'interpreter la nature et non plus de l'observer passivement.

Autre chose est le copiste, rimitateur servile et I'artiste qui arrache a la nature ses secrets et les divulgue a ceux qui n'ont point ce privilege.

Pareille distinction s'impose pour la nature morale.

Deux natures, ega- lement reelles, existent dans l'homme : l'une materielle et sensible; l'autre spirituelle et raisonnable.

11 y a en nous des instincts bas, des passions dereglees, des sentiments egoistes et des penchants nobles, des passions genereuses, des sentiments eleves.

Dire que la nature est dans cette dua- lite, c'est n'expliquer rien.

La morale nous apprend que la vraie nature de l'homme est dans ce qui l'exalte, le pousse au desinteressement, non ce qui le degrade ou le rend semblable aux forces aveugles de la nature (Her- nani).

L'art realiste repousse cette intrusion de la morale.

Ilfeint de l'ignorer et pretend ne relever que de lui-meme - doctrine de « l'Art pour l'Art ».

- Passif echo de la realite, it affecte de peindre, sans prendre parti, le bien et le mal, le noble et le hideux, le grossier et le delicat, l'absurde et le raisonnable.

Il appelle ce chaos le vrai, la nature.

A quoi sert cette re- presentation? Peu lui importe Et comment imiter cette nature integrate? En copiant fldelement, exac- tement robjet.

Pour le realiste pur, la ressemblance est la marque de l'imi- tation parfaite.

On se rappelle le mot de Pascal, se meprenant sur l'objet de l'art Quelle vanite que la peinture qui attire l'admiration par la res- semblance des choses dont on n'admire pas les originaux! » Mais alors la photographic des couleurs l'emporte sur la peinture, le moulage sur la sculpture, une botanique decrivant minutieusement renferme toute la poesie des fleurs! Non, si l'homme est le plus imitateur des animaux, it est aussi celui qui trouve le plus de plaisir a creer; la plus petite invention lui pro- cure plus de joie que la plus parfaite imitation.

Le realisme lui refuse cette joie, n'etant pas une creation de l'intelligence, de l'imagination hu- maines, mais un fruit de l'industrie et de l'habilete manuelle.

La copie la plus exacte ne trompe que les titres inintelligents ou incultes.

Les oiseaux se peuvent meprendre devant les raisins de Zeuxis, l'homme cultive taxe de puerilite indigne de l'artiste cette trop parfaite imitation. D'ailleurs cette reproduction est impossible.

Les oeuvres les plus sim- ples de la nature defient le plus habile, le plus patient des artistes : un brin d'herbe, un scarabee, une aile de papillon ont de quoi decourager ceux qui pretendent rivaliser avec la nature.

Et puis, nous l'avons dit, les aspects des choses et des hommes varient.

Auquel s'arretera I'artiste? Quel est le plus vrai? S'il s'agit d'un paysage, le reproduira-t-il ou enveloppe de brume, ou convert de neige?...

De meme, en face de In nature morale.

Le cceur humain est changeant; passions du eceur, opinions de l'esprit, decisions de la volonte sont sujettes a de constantes fluctuations.. Comment brosser un tableau fidele de la vie, si complexe? Tout ne saurait entrer en ligne de compte dans l'inventaire que pretend dresser le realiste pur.

Balzae, si rnetieuleux, n'y parvient pas.

13n choix s'impose; et c'en est fait de in theorie. Voilà, croyons-nous, comment il faut apprécier cette assertion en fonc­ tion de Victor Hugo.

Mais on peut la discuter théoriquement et historique­ ment; c'est à quoi nous allons maintenant nous essayer.

Que faut-il, d'abord, entendre par Nature? Est-ce le monde réel, tel qu'il apparaît à nos sens à un moment donné?...

Si oui, cette réalité sensible est-elle toujours saisissable?... Il est des états transitoires, accidentels de la réalité, des détails qui échappent au pinceau, au ciseau, à la description.

Il existe une petite fleur appelée « le Désespoir du peintre » ; on pourrait leur donner à toutes ce nom.

Ce que l'artiste veut saisir et imiter ne peut être la nature visible et mobile. S'il s'y arrête, le type, l'esprit, l'idée qui se cachent sous un aspect fugace lui échappent.

La réalité n'est pas toujours dans les apparences; la nature vraie ne se traduit pas nécessairement dans un seul jeu de physionomie, dans un seul geste, dans une seule parole.

L'artiste doit donc s'attacher à la nature générale et permanente, qui n'est pas toujours visible, mais que l'art, précisément, sait découvrir, dé­ voiler, fixer. Ceci exige chez l'artiste un regard profond, un don de divi­ nation qui lui permet d'interpréter la nature et non plus de l'observer passivement.

Autre chose est le copiste, l'imitateur servile et l'artiste qui arrache à la nature ses secrets et les divulgue à ceux qui n'ont point ce privilège.

Pareille distinction s'impose pour la nature morale. Deux natures, éga­ lement réelles, existent dans l'homme : l'une matérielle et sensible; l'autre spirituelle et raisonnable. Il y a en nous des instincts bas, des passions déréglées, des sentiments égoïstes et des penchants nobles, des passions généreuses* des sentiments élevés. Dire que la nature est dans cette dua­ lité, c'est n'expliquer rien. La morale nous apprend que la vraie nature de l'homme est dans ce qui l'exalte, le pousse au désintéressement, non ce qui le dégrade ou le rend semblable aux forces aveugles de la nature (Her- nani). L'ari réaliste repousse cette intrusion de la morale. Il feint de l'ignorer et prétend ne relever que de lui-même — doctrine de « l'Art pour l'Art ».

— Passif écho de la réalité, il affecte de peindre, sans prendre parti, le bien et le mal, le noble et le hideux, le grossier et le délicat, l'absurde et le raisonnable. Il appelle ce chaos le vrai, la nature. A quoi sert cette re­ présentation? Peu lui importe! Et comment imiter cette nature intégrale? En copiant fidèlement, exac­ tement l'objet.

Pour le réaliste pur, la ressemblance est la marque de l'imi­ tation parfaite. On se rappelle le mot de Pascal, se méprenant sur l'objet de l'art : « Quelle vanité que la peinture qui attire Vadmiration j>ar la res­ semblance des choses dont on n'admire pas les originaux! » Mais alors la photographie des couleurs l'emporte sur la peinture, le moulage sur la sculpture, une botanique décrivant minutieusement renferme toute la poésie des fleurs! Non, si l'homme est le plus imitateur des animaux, il est aussi celui qui trouve le plus de plaisir à créer; la plus petite invention lui pro­ cure plus de joie que la plus parfaite imitation. Le réalisme lui refuse cette joie, n'étant pas une création de l'intelligence, de l'imagination hu­ maines, mais uni fruit de l'industrie et de l'habileté manuelle. La copie la plus exacte ne trompe que les êtres inintelligents ou incultes. Les oiseaux se peuvent méprendre devant les raisins de Zeuxis, l'homme cultivé taxe de puérilité indigne de l'artiste cette trop parfaite imitation.

D'ailleurs cette reproduction est impossible. Les œuvres les plus sim­ ples de la nature défient le plus habile, le plus patient des artistes : un brin d'herbe» un scarabée, une aile de papillon ont de quoi décourager ceux qui prétendent rivaliser avec la nature. Et puis, nous l'avons dit, les aspects des choses et des hommes varient.

Auquel s'arrêtera l'artiste? Quel est le plus vrai? S'il s'agit d'un paysage, le reproduira-t-il ensoleillé, ou enveloppé de brume, ou couvert de neige?... De même, en face de la nature morale. Le cœur humain est changeant; passions du cœur, opinions de l'esprit, décisions de la volonté sont sujettes à de constantes fluctuations.

Comment brosser un tableau fidèle de la vie, si complexe? Tout ne saurait entrer en ligne de compte dans Finventaire que prétend dresser le réaliste pur. Balzac, si méticuleux, n'y parvient pas.

Un choix s'impose; et c'en est fait de la théorie.. »

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