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Connais-toi toi-même disait Socrate...

Publié le 22/02/2012

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socrate
Connais toi toi même Il est des maximes, sentences, dictons, que l'on répète à l'envi en croyant fermement qu'on les a comprise et que leur signification est évidente. C'est le cas du connais-toi toi même. Se connaître soi même, quoi de plus évident. Tous ceux qui veulent faire un chemin spirituel proclament « je veux mieux me connaître ». Bien, mais qu'est-ce que cela veut dire au juste ? Et chacun de se faire connaître ou de se reconnaître dans le « je suis ceci, je suis cela », colérique, ambitieux, tolérant, soupe au lait etc, chrétien, agnostique, laic, républicain, démocrate… Défauts, qualités, caractéristiques, opinions, convictions, est-ce cela se connaître ? Encore faudrait-il préalablement répondre à la question : qui connaît qui ? Je Me connais, bien mais... qui est le je et qui est le me ? Qui est le je qui connaît le me ? Est-ce une partie de nous même qui connaît l'autre, ou les autres et si oui, quelle partie ? Et cette partie qui connaît l'autre partie, qui la connaît ? Est-ce le « je » qui connait le « me » qui connaît le « je » ? Mais alors qui connaît le je ET le me ? Un troisième larron ? Combien y a-t-il de larrons en nous ? Force est de constater que ce n'est pas si simple que cela. Prenons du champ, si je connais la mécanique, la menuiserie ou l'art floral, cela veut dire quoi ? Qu'il y a d'un côté une matière à connaître et de l'autre un connaissant et la proposition n'est pas réversible. Si je déclare me connaître moi même, qui est matière à connaître, qui est connaissant ? La matière à connaître c'est moi ! qui moi ? un nom, un physique, une situation sociale, un caractère, une histoire, des histoires, un métier ? L'instrospection peut bien se faire sur un divan… Bon, et qui connaît la matière à connaître ? Qui est celui qui se connaît ? On y revient, on tourne en rond. Il faut sortir du cercle vicieux... mais qui va sortir du cercle ? A – L'homme dans son impermanence Observons ceci, toutes les connaissances que nous pouvons avoir de nous même et étaler hors ou en nous sont au mieux anecdotiques, souvent transitoires voire complètement éphémères. Je suis coléreux, mais pas tout le temps, je m'appelle Victor, c'est anecdotique, je suis comptable, cela est éphémère. Je suis en bonne santé, cela peut changer et ainsi de suite. Alors que suis-je, qui suis-je qui ne change pas, ne bouge pas, a toujours été là ? Vérité aujourd'hui, erreur demain, où est ma permanence ? Sans compter le fait qu'on est toujours l'idiot de quelqu'un, l'idole d'un autre, l'indifférent pour un troisième, le nul pour untel, le sachant pour son voisin. Si l'on tient compte du monde extérieur, cela se complique singulièrement. Connais toi ! facile à dire, mais connaître qui ? Je change tout le temps, le monde change tout le temps, l'univers change tout le temps. J'étais enfant et j'étais un enfant comme ceci et comme cela, j'étais adolescent et rétrospectivement je crois bien connaître l'ado que j'étais… mais que je ne suis plus ! Et puis j'ai été jeune homme, puis homme jeune, puis homme mûr, bientôt senior, peut être un jour vieil homme, vieillard… J'étais, je suis, j'ai changé, je change, j'aimais ceci, j'aime cela, celle-ci pour celle là. Je suis de bonne humeur, puis d'humeur massacrante, triste puis gai. Pas de ma faute tout çà ai-je pu croire un moment, c'est la vie qui évolue, bouge, change, la vie, les autres, les patrons, le percepteur. Qui niera le changement, mon histoire, la tienne, l'Histoire avec un grand H, le temps qui passe, les joies, les épreuves, les victoires, les défaites. Le propre de la vie est d'être un mouvement perpétuel, le corps fonctionne tout seul, les pensées se succèdent sans que nous y prêtions souvent attention, nous sommes les fils du temps plus que ceux de nos pères, nous pensons, agissons, sentons ainsi qu'on nous a appris à le faire. Goethe disait « tu crois pousser et tu es poussé ». L'impermanence est notre condition, notre état quotidien. Ce dont je m'occupe, ce à quoi j'ai affaire, je m'y identifie, me voici au travail, me voici en famille, me voici en réunion associative, me voici seul. Je préfère tel état à tel état, je connais ces états mais qu'est-ce que cela veut dire ? B – la notion du même En fait, qui dit « je connais ces états » ou « je me connais », qui sinon le « même » en moi, celui qui n'a pas grandi, n'a pas vieilli, n'a jamais changé, est resté et reste immuable. La connaissance de nos différents « moi » n'est pas le fait d'un de ces « moi », ce qui rend ma présence possible à moi même n'est pas une partie de ce que je suis, une case parmi les autres cases, ce qui fait qu'au matin, quand je me réveille, je suis instantanément présent à moi même, c'est précisément le même ! Réfléchissons quelques instants à cette notion. Nous ne pouvons connaître l'impermanence, la notre, celle du monde, que grâce à une permanence, un référentiel qui soit immuable. Qui en moi sait que j'étais ceci et que je suis cela, qui constate le changement sinon ce qui ne change pas. Qu'est-ce donc ? On peut l'appeler conscience, ou lumière, ou présence mais qu'est-ce ? Derrière cette question et son apparente banalité ou évidence se cache un profond mystère En aucun cas cette présence ne peut être assimilée au cogito car elle n'est pas la pensée, c'est elle au contraire qui la permet. Aussi loin que je remonte dans l'introspection, je ne peux saisir ce qui me permet de penser, quelle que soit la profondeur de ma méditation, je ne peux appréhender ce qui me permet de méditer. Tandis qu'en état de sommeil profond je suis absent à moi même, dès le réveil, instantanément, je suis présent, avant même ma première pensée et c'est cette présence qui m'autorise à savoir que c'est « moi » qui ai dormi. Car elle (la présence) n'a pas dormi, elle restait occultée comme est occultée une émission de radio ou de télévision quand le poste est éteint, occultée mais latente, permanente. Cette notion du même est sans doute la plus difficile à saisir car ce témoin permanent en nous paraît évident. Ce même, ce « Soi » des Hindous n'est pas le produit du corps, ne dépend pas de ce que nous sommes ou de qui nous sommes. Il est ce mystère du vivant, du conscient qui fait notre spécificité.

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