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Commentaire d'arrêt C. cass Civ 3ème, 17 janvier 2007 (droit)

Publié le 07/07/2012

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L’article 2274 du Code civil dispose que « La bonne foi est toujours présumée, et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver «. Dans un souci de charge de la preuve, la Cour avait évitée cet obstacle (C.cass, civ 1ère 10 mai 1989) en faisant peser la charge de la preuve au professionnel afin qu’il démontre qu’il avait rempli son obligation d’information (c’est également le cas pour l’obligation d’information des médecins sur les risques encourues par une opération qui pose un lourd problème de preuve). Ce transfert de la charge de la preuve ne respecte ni l’article 2274 du Code civil et créé même une présomption de mauvaise foi à l’encontre du professionnel contre lequel on allègue une réticence dolosive. Or, l’absence de nullité de l’achat pour cause de dol, provoquant l’erreur sur la valeur en raison de l’inexistence d’obligation d’information que l’acquéreur devrait remplir au profit du vendeur, permet à l’acquéreur d’exploiter la méconnaissance de l’autre partie. Cette capacité réitérée par la Cour de cassation ne remplit pas les exigences de bonne foi alors que celle-ci est elle même cause de nullité de la convention.

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« En effet, cette prise en compte de la qualité des parties n’est pas sans rappeler le droit de la consommation (évoqué précédemment) ainsi que les jurisprudencesabondantes relatives aux obligations d’informations imposées aux vendeurs professionnels.

Ainsi la Cour de cassation déclara que « l’information sur la saillie etdonc sur la gravidité éventuelle dont se prévalait le vendeur pour réfuter la thèse de l’erreur avait été donnée postérieurement à l’achat » (C.cass, civ 1ère, 5février2002).

Cette affirmation rejoint l’obligation de renseignement précontractuelle c'est-à-dire à priori.

Le non respect de l’obligation d’information ne peut être, enrevanche, invoquée si celle-ci n’était pas inhérente à la qualité même de l’autre partie.

Autrement dit, si l’information a été l’objet d’une grande campagne depublicité (C.cass, ch.com, 17 juillet 2001) l’acheteur ne pourra se prévaloir de la méconnaissance de cette information.

Désormais, dans le cadre d’un achat, leprofessionnel est également exempté de cette obligation d’information.

La qualité des parties se trouve ainsi, dans le cadre de l’erreur sur la valeur d’un bien,rééquilibrée.

La réticence dolosive ne résulte pas exclusivement d’un manquement au devoir de loyauté établie par l’obligation d’information : la réticence peut aussiêtre due à la mauvaise foi d’une des parties.2-Une réticence due à la mauvaise foi non caractériséeLa réticence dolosive fondée sur la mauvaise foi de l’une des parties est cause de nullité.

On considère en effet que, rejoignant le principe de l’élément intentionneldu dol mais également un silence sur une information déterminante, la mauvaise foi doit être sanctionnée.

Ce qui fonde l’annulation d’une convention pour dol est sacapacité à provoquer l’erreur en défaveur de l’un des cocontractants.

Mais qu’en est-t-il lorsque l’erreur n’a pas été provoquée ? Comment la partie qui se sent léséepourra t elle donner suffisamment de base légale à ce moyen ? Cette interrogation rejoint directement celle de la preuve du dol.

La réponse est que l’exploitation del’erreur subie par une partie est cause de nullité.

En effet, dans un arrêt du 18 février 1997, la première chambre civile de la Cour de cassation avait estimée qu’il yavait eu un « manquement à l’obligation de contracter de bonne foi » et qu’il en résultait la nullité de la convention.

Comme dit précédemment la difficulté résideaussi en l’apport de la preuve de l’exploitation de l’erreur.

La Cour de cassation, afin de contourner l’obstacle, a étendue son interprétation de bonne foi en la reliant àl’obligation d’information qui pèse sur les professionnels.

Ainsi, dans un arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 10 mai 1989, la Cour décida que« manque à son obligation de contracter de bonne foi et commet ainsi un dol par réticence la banque qui, sachant que la situation de son débiteur estirrémédiablement compromise ou à tout le moins lourdement obérée, omet de porter cette information à la connaissance de la caution afin d’inciter celle-ci às’engager ».

Cependant, dans cet arrêt du 17 janvier 2007, la Cour estima que la réticence dolosive ne pouvait se caractérisée en raison de l’absence d’obligationd’information portant sur le vendeur sur la valeur de la chose, et qu’il en résultait que l’annulation de la convention par la Cour d’appel violait l’article 1116 du Codecivil, motif à cassation, mais ne s’est pas prononcée sur la question de la bonne ou mauvaise foi de l’acquéreur.

Or, en raison de l’équilibre des parties, l’acquéreur,en l’espèce professionnel, aurait du fournir la preuve de sa bonne foi, tout comme il en était imposé à la banque dans l’exemple précédent, ce qui n’est pas le cas.

Ilfaut dès lors s’interroger plus en profondeur sur l’absence de l’obligation d’information sur la valeur d’un bien portant sur l’acquéreur. II-L’absence de l’obligation d’information sur la valeur du bien acquis portant sur l’acquéreur L’absence de l’obligation d’information sur la valeur du bien acquis pour l’acquéreur induit de nombreux effets.

Celle-ci induit une redéfinition des critères nullitéd’une convention sur l’erreur sur la valeur causée par dol (A) et soulève également des conséquences critiquables (B).A)Une redéfinition des critères de nullité d’une convention sur l’erreur sur la valeur causée par le dol1-Un silence intentionnel non cause de nullité Un bref résumé des critères de nullité pour dol s’impose.

Est cause de nullité pour dol toutes manœuvres qui amènent une partie à contracter.

Le mensonge ainsi quele silence, c'est-à-dire la réticence dolosive, sont des causes de nullité.

Cependant, l’absence d’obligation d’information pour l’acquéreur sur la valeur du bien acquisau profit du vendeur modifie ces critères.

Désormais, la réticence dolosive n’est plus une cause de nullité dans ce cas précis.

Traditionnelement, l’erreur sur la valeurfait partie des erreurs indifférentes c'est-à-dire n’étant pas cause de nullité.

A cette erreur sur la valeur se rajoute celle sur la personne (ou dit intuitu personae) dans lecas où elle n’est pas déterminante, l’erreur sur les motifs et l’erreur sur les qualités non substantielles de la chose.

Nonobstant, la nullité d’une convention avaitlongtemps été admise lorsque l’erreur dite indifférente avait été provoquée par dol (et incluant ainsi la réticence dolosive).

Plusieurs arrêts témoignent de la nullité,anciennement établie, pour dol provoquant l’erreur sur la valeur (C.cass,civ 3ème, 15 décembre 2000 et C.cass, ch com, 12 mai 2004).

Il faut désormais faire unenouvelle distinction : est cause de nullité l’erreur sur la valeur provoquée par dol si le dol consiste en un mensonge ou une manœuvre autre que le silence et si cetteréticence est celle de l’acquéreur même professionnel.

Ce nouveau découpage dans l’approche de la réticence dolosive n’est pas purement fortuit.

Il résulte de raisonsbien particulières, tenant à la fois à la sécurité juridique et au respect des intérêts économiques, que la Cour de cassation ait décidée de faire prévaloir cesconsidérations malgré le propre fruit de sa jurisprudence.2-Les raisons de cette absenceLe droit poursuit une logique de sécurité juridique tenant à un nécessaire équilibre du droit afin que les contractants puissent suffisamment anticiper l’état du droit envu de réaliser des conventions, à court comme à long terme, sans être inquiétés de changements récurrents de l’état du droit.

Partant, les conventions ne doivent pasêtre remises sans cesse en cause, leur stabilité doit être assurée.

En droit communautaire la sécurité juridique est le principe selon lequel les particuliers et lesentreprises doivent pouvoir compter sur une stabilité minimale des règles de droit et des situations juridiques.

Il en découle un certain nombre de disposition commela non rétroactivité des textes communautaires.

En droit administratif ce principe n’a été consacré qu’à partir de 2006 par le Conseil d’Etat lorsqu’il s’opposa à ceque la modification avec effet immédiat d’un texte réglementaire porte une atteinte excessive à une situation contractuelle en cours.

Ainsi, permettre à un vendeur dedemander la nullité d’un acte de vente pour ne pas avoir été informé de la valeur du bien réelle remettrait en cause la stabilité contractuelle.

C’est pourquoi la Cour decassation estima qu’il n’y avait pas lieu de déclarer la nullité d’une convention pour réticence dolosive provoquant l’erreur sur la valeur pour un acquéreur dans sonarrêt du 17 janvier 2007.

Le raisonnement justifiant la position de la Cour sur ce sujet n’est pas uniquement juridique, il répond également à des considérationséconomiques.Outre le fait d’avoir favorisé les échanges économiques à long terme à travers la forme du contrat, le droit a toujours rejoint les intérêts des parties souvent onéreuxmais dans le souci d’un équilibre.

L’économie repose sur un principe de recherche de profit et ce dernier est fondé sur la spéculation.

L’intérêt économique auraitainsi plus tendance à opter pour la conception classique de l’obligation du contrat « Emptor debet esse curiosus » et c’est sur ce point que la Cour rejoint l’intérêtéconomique.

En effet, comment une entreprise pourrait-elle faire du profit si elle devait communiquer des informations relatives sur la valeur réelle (non en sensmatériel mais commun c'est-à-dire du « juste prix » que le droit canonique avait tenté d’insuffler dans le contrat) de la chose qu’elle entend vendre ? L’absurdité dupropos est éloquente.

Toujours dans le domaine économique, une autre raison quant à cette prise de position peut être avancée.

L’achat est désormais moinssusceptible de nullité or sans achat pas de revente (en l’occurrence l’agent immobilier qui est devenu acquéreur de l’immeuble de l’agriculteur avait peut êtreenvisagé de le revendre).

Or la vente est quant à elle soumise à de nombreuses exigences parfois lourdes de conséquences pour les professionnels.

C’est notamment lecas des dispositions relatives aux vices cachés de la chose comme en témoigne l’article 1645 du Code civil qui dispose que « Si le vendeur connaissait les vices de lachose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

».

Cette disposition est à cumulée à la présomptionirréfragable (c'est-à-dire non susceptible de supporter la preuve contraire) établissant le fait que le vendeur professionnel connaissait les vices cachés de la chose.L’objectif de la Cour pourrait ainsi être de donner une plus large protection de l’acquéreur quant à son achat car celui-ci, souvent professionnel, sera soumis à cetteprésomption qui ne peut être réfutée lorsqu’il sera mis en vente : une recherche d’un meilleur équilibre.

Cependant, ces considérations de retient la Cour de cassationn’est pas exempte de critiques.B)Les conséquences critiquables de cette absence1-La limitation de la bonne foiL’article 2274 du Code civil dispose que « La bonne foi est toujours présumée, et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver ».

Dans un souci de charge dela preuve, la Cour avait évitée cet obstacle (C.cass, civ 1ère 10 mai 1989) en faisant peser la charge de la preuve au professionnel afin qu’il démontre qu’il avaitrempli son obligation d’information (c’est également le cas pour l’obligation d’information des médecins sur les risques encourues par une opération qui pose unlourd problème de preuve).

Ce transfert de la charge de la preuve ne respecte ni l’article 2274 du Code civil et créé même une présomption de mauvaise foi àl’encontre du professionnel contre lequel on allègue une réticence dolosive.

Or, l’absence de nullité de l’achat pour cause de dol, provoquant l’erreur sur la valeur enraison de l’inexistence d’obligation d’information que l’acquéreur devrait remplir au profit du vendeur, permet à l’acquéreur d’exploiter la méconnaissance de l’autrepartie.

Cette capacité réitérée par la Cour de cassation ne remplit pas les exigences de bonne foi alors que celle-ci est elle même cause de nullité de la convention.Outre le fait de limiter la notion de bonne foi, l’élément intentionnel de la réticence dolosive, quant bien même elle ne provoquerait pas l’erreur mais en profiterait,s’en trouve affecté.

En effet, cette absence de nullité malgré l’intention de profiter de l’erreur réduit l’élément intentionnel au seul cas du mensonge ou desmanœuvres provoquant l’engagement tandis que c’est au concept même de silence et donc de réticence dolosive qu’il a une portée essentielle.

La limitation de la. »

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