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CITÉ, substantif féminin.

Publié le 13/11/2015

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CITÉ, substantif féminin.  

I.—  Communauté politique indépendante. 

A.—  [Dans l'Antiquité et au Moyen Âge]  Groupe d'hommes libres constituant une société politique indépendante, ayant son gouvernement, ses lois, sa religion et ses moeurs propres. La cité antique; les cités grecques; les dieux protecteurs de la cité. Il faut bannir de notre République les souvenirs des cités républicaines de la Grèce ou de l'Italie du Moyen Âge (Les Fondateurs de la Troisième République (PIERRE BARRAL), Ferry, 1885, page 244) : 

Ø 1. Un certain nombre de familles, indépendantes et sans lien entre elles, se partageaient le pays; chacune d'elles formait une petite société que gouvernait un chef héréditaire. Puis ces familles se groupèrent et de leur association naquit la cité athénienne.

NUMA-DENIS FUSTEL DE COULANGES, La Cité antique,  1864, page 309. 

—  Droit de cité. Jouissance de tous les droits de citoyen, de membre d'une cité, avec les privilèges qui en découlent : 

Ø 2. Dans les républiques de l'Antiquité, la petitesse du territoire faisait que chaque citoyen avait politiquement une grande importance personnelle. L'exercice des droits de cité constituait l'occupation et pour ainsi dire l'amusement de tous. Le peuple entier concourait à la confection des lois, prononçait les jugements, décidait de la guerre et de la paix.

BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, De l'Esprit de conquête et de l'usurpation,  1813, page 204. 

·    Elliptique. La cité. En accordant la cité à la plupart des Italiens, Rome ne terminait pas la guerre; elle l'introduisait dans ses murs (JULES MICHELET, Histoire romaine, tome 2, 1831, page 173 ). 

—  Par extension.  Jouissance des droits politiques suivant les lois du pays (Confer Georges Lefebvre, La Révolution française, 1963, page 499). 

—  Au figuré.  Droit d'admission dans un domaine : 

Ø 3.... avoir donné droit de cité si égal à chacun de tous mes désirs, les avoir si semblablement accueillis, que tous à présent, à la même heure, prétendent à la première place.

ANDRÉ GIDE, Feuillets d'automne,  1893, page 47. 

B.—  Par analogie, moderne.  [Dans la terminologie juridique]  Ensemble des citoyens constituant un corps indépendant soumis à des lois propres. Synonymes : État, nation, république. Directions démocratiques de la Cité du Vatican (LÉON DAUDET, Le Bréviaire du journalisme,  1936, page 106 ). 

—   [Souvent employé avec l'article défini, au sens général]  Les lois de la cité; la famille et la cité. Synonyme : patrie. L'homme, élément politique, membre de la cité (PAUL VALÉRY, Variété III, 1936, page 248) : 

Ø 4. Cher concitoyen —  car il n'y a qu'une cité, et en attendant la République universelle, l'exil est une patrie commune —  vous avez une grande pensée. J'y adhère avec empressement et joie.

VICTOR HUGO, Correspondance,  1855, page 218. 

Ø 5. Elles ne se désintéresseront plus des questions vivantes du monde : ce qui était monstrueux, car il n'est pas tolérable qu'une femme, même la plus soucieuse de ses devoirs domestiques, se croie dispensée de songer à ses devoirs dans la cité moderne.

ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, La Nouvelle journée, 1912, page 1477. 

C.—  Au figuré, style noble. 

1. Société politique, religieuse idéale (à venir, à laquelle on aspire) ou mystique. Lorsque la cité sans classe sera édifiée, lorsque la cité socialiste sera construite il n'y aura plus aucune opposition entre les hommes (JEAN LACROIX, Marxisme, existentialisme, personnalisme,  1949, page 33 ). 

·    Cité idéale : 

Ø 6. Ils revoyaient, là-bas, quand leurs yeux se troublaient de faiblesse, la cité idéale de leur rêve, mais prochaine à cette heure et comme réelle, avec son peuple de frères, son âge d'or de travail et de repas en commun.

ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1328. 

·    Cité future. ... ce sculpteur ingénu qui, dans la cité future, fait des pipes d'une beauté non pareille parce qu'il les fait avec amour, et qu'il les donne et ne les vend pas (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Petit Pierre,  1918, page 59 ). 

2. Par analogie.  RELIGION CATHOLIQUE.  L'Église du Christ, l'assemblée du peuple de Dieu dont les membres sont citoyens du ciel, le Royaume de Dieu : 

Ø 7.... comme chacun de nous est citoyen de deux cités, la cité terrestre et la cité de Dieu, de même chacun de nos actes est un point où viennent interférer une relation au moins possible au bien commun de la cité terrestre, et une relation au bien commun spirituel de la cité des saints, suprême et souveraine gardienne des valeurs morales.

JACQUES MARITAIN, Primauté du spirituel,  1927, page 41. 

—  En particulier. 

a) Cité de Dieu. 

·    [Sur la terre]  Le Royaume de Dieu qui se construit, le peuple de Dieu en marche, l'Église visible. Synonymes : cité militante, Église militante :  

Ø 8. L'idéal d'une autre société, l'amour d'une autre cité, leur manquaient [aux Pharisiens] . Loin de chercher, comme dit Saint Paul, la cité future, ou, comme dit Saint Augustin, la cité de Dieu, ils ne cherchaient que la conservation de la grossière cité juive...

PIERRE LEROUX, De l'Humanité, de son principe et de son avenir, tome 2, 1840, page 681. 

·    [Au ciel]  L'assemblée des saints, des bienheureux, le Paradis. Synonymes : cité triomphante, Église triomphante, cité céleste, ciel :  

Ø 9. Les concerts de la Jérusalem céleste retentissent surtout au Tabernacle très-pur qu'habite dans la Cité de Dieu l'adorable Mère du Sauveur. Environnée du choeur des veuves, des femmes fortes et des vierges sans tache, Marie est assise sur un trône de candeur.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Martyrs ou le Triomphe de la religion chrétienne, tome 1, 1810, page 190. 

b) Cité céleste. Assemblée des saints avec Dieu au ciel après leur vie terrestre. Synonyme : cité de Dieu :  

Ø 10.... la Cité de Dieu se construit progressivement à mesure que le monde dure, et le monde n'a même d'autre raison de durer que l'attente de son achèvement. De cette cité céleste, c'est-à-dire invisible et mystique, les hommes sont les pierres et Dieu est l'architecte.

ÉTIENNE GILSON, L'Esprit de la philosophie médiévale, tome 2, 1932, page 185. 

c) Cité sainte. L'Église sur terre. Nous ne voulons pas nous séparer du corps de l'Église et perdre nos droits de citoyens dans les assemblées de la cité sainte (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Lélia,  1839, page 474 ). 

D.—  Par extension.  Ville en tant que corps politique et/ou administratif; communauté politique, administrative que constituent les habitants, les citoyens d'une ville. Une grande cité : 

Ø 11.... toute la distance qui sépare les civilisations rudimentaires d'une civilisation avancée, comme entre la petite ville d'autrefois et les immenses cités que notre époque voit grandir.

PAUL VIDAL DE LA BLACHE, Principes de géographie humaine,  1921, page 170. 

Ø 12. Il s'agissait seulement de donner pendant quelque temps les preuves de sa compétence dans les questions délicates que posait l'administration de notre cité.

ALBERT CAMUS, La Peste,  1947, page 1251. 

II.—  Par métonymie. 

A.—  1. [Dans l'Antiquité] 

a) Territoire d'une cité. Je passai chez les Treveri, dont la cité est la plus belle et la plus grande des trois Gaules (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Martyrs ou le Triomphe de la religion chrétienne, tome 1, 1810 page 273 ). 

b) Capitale d'une cité. Une cité grecque. Avenches, Aventicum, cité des Helvètes (PIERRE LAVEDAN, Qu'est-ce que l'urbanisme?  1926, page 120 ). L'antique cité phocéenne (ANTOINE ALBITRECCIA, Ce qu'il faut connaître des grands moyens de transport,  1931, page 121 ). 

2. Moderne.  [Souvent désigne une ville importante, cité étant alors simple synonyme de ville dans le langage littéraire, poétique]  Ensemble d'édifices. Les cités industrielles, au lieu d'être concentriques, deviendront donc linéaires (ÉDOUARD JEANNERET-GRIS, DIT LE CORBUSIER, La Charte d'Athènes,  1957, page 59) : 

Ø 13. Et le recueillement était profond, comme si toute la vieille cité devenait un prolongement de la cathédrale. Seuls, des bruits de voitures montaient de Beaumont-la-Ville, la cité nouvelle...

ÉMILE ZOLA, Le Rêve,  1888, page 116. 

—   [En parlant d'une ville ancienne, souvent fortifiée]  Un « quartier de la gare », aux activités nouvelles, a doublé souvent l'ancienne cité (JEAN-ALAIN LESOURD, CLAUDE GÉRARD, Histoire économique, XIXe.  et XXe.  siècles, tome 1, 1968, page 268) : 

Ø 14.... ils traversèrent tout d'une traite la ville basse, s'élancèrent, ceci fait, à l'assaut de la ville haute, vieille cité Renaissance bâtie en flanc de butte, dominant de haut sa cadette, restée intacte...

GEORGES MOINAUX, DIT GEORGES COURTELINE, Le Train de 8 h 47,  1888, II, 5, page 145. 

—  Cité sainte. Centre religieux capital, lieu de pèlerinage, lieu d'origine d'une religion. En particulier.  Jérusalem : 

Ø 15. Ah! oui, dans l'imagination d'un Juif de l'Europe orientale, cela existe l'amour de Sion! Jamais le coeur du peuple dispersé n'a cessé de soupirer vers la sainte cité de David. L'an prochain, à Jérusalem!

JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, L'An prochain à Jérusalem!  1924, page 54. 

—  Par métaphore.  [En parlant de la Jérusalem nouvelle de l'Apocalypse]  Le Paradis, lieu de l'assemblée des bienheureux. Et moi, Jean, je vis la Cité sainte, la Jérusalem nouvelle qui descendait du ciel à côté de Dieu, comme une épouse qui s'est parée pour son époux! (PAUL CLAUDEL, Poésies diverses, Les 2 cités, 1952, page 845 ). 

·    Les Chevaliers bienfaisants de la Cité sainte. Les Templiers (Confer Paul Naudon, La Franc-maçonnerie, 1963, page 103). 

B.—  Spécialement. 

1. [Dans certaines villes comme Paris, Londres, Carcassonne]  Le quartier le plus ancien de la ville, le centre primitif de la ville. Synonymes : cité-mère (confer Georges Bernanos, L'Imposture, 1927, page 506). Un office de commerce dans la Cité de Londres (JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Dingley, l'illustre écrivain,  1906, page 11 ). L'île de la Cité avec le Palais et la Sainte-Chapelle (PIERRE LAVEDAN, Qu'est-ce que l'urbanisme?  1926, page 195) : 

Ø 16. Au quinzième siècle, Paris était encore divisé en trois villes tout à fait distinctes et séparées, ayant chacune leur physionomie, leur spécialité, leurs moeurs, leurs coutumes, leurs privilèges, leur histoire : la Cité, l'Université, la Ville. La Cité, qui occupait l'île, était la plus ancienne, la moindre, et la mère des deux autres...

VICTOR HUGO, Notre-Dame de Paris,  1832, page 138. 

—  ARCHÉOLOGIE.  Cités lacustres. Villages sur pilotis au milieu de lacs (Confer Marcellin Boule, Conférences de géologie, 1907, page 209). 

2. Par extension. 

a) Agglomération de maisons individuelles formant un ensemble clos. 

—   [Au centre d'une grande ville, par exemple à Paris]  Cité Bergère (VICTOR HUGO, Correspondance,  1872, page 328 ). Cité Trévise (STÉPHANE MALLARMÉ, Vers de circonstance, Les Loisirs de la poste, 1898, page 94 ). 

—   [À la périphérie, dans la banlieue]  Cités résidentielles (Les Grands ensembles d'habitation.  1963, page 35 ). Une petite maison de la cité des Jasmins, à Auteuil (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Lys rouge,  1894, page 88) : 

Ø 17. Jaurès assassiné. Je suis allé dès le matin chez lui, porter une lettre à sa fille. Une cité de villas à Passy, quelques agents à la grille de cette cité. Je vais à la maison, une petite maison, un jardinet de deux mètres devant où se tiennent deux militants.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 11, 1914-18, page 86. 

b) Agglomération de pavillons ou d'immeubles à destination particulière. 

—  Cité + adjectif. 

·    Cité administrative (Gérard Belorgey, Le Gouvernement et administration en France, 1967, page 229). 

·    Cité ouvrière (pour loger les familles d'ouvriers à proximité d'une usine). Il est capable de fonder une usine, un entrepôt et une cité ouvrière tout autour (FRANCIS DE MIOMANDRE, Écrit sur de l'eau.  1908, page 195 ). Les petits jardins qui entourent les maisons de brique des cités ouvrières (GEORGES BERNANOS, La joie,  1929, page 654 ). 

·    Cité universitaire (pour loger les étudiants à proximité d'une faculté). Un air léger de printemps, tout parfumé de l'arome des premiers arbustes en fleurs, enveloppait la tranquille cité universitaire (PAUL BOURGET, Nos actes nous suivent,  1926, page 163 ). 

—  Cité + substantif. 

·    Cité-dortoir  (pour loger des personnes à proximité de leur ville de travail). Les inconvénients des cités dortoirs (Les Grands ensembles d'habitation.  1963, page 22 ).  Par analogie. Cité d'abeilles. Ruche. Atfeh est une simple ville arabe (...) avec de petites cours intérieures abritées par des paillassons déchiquetés, ce qui leur donne de loin l'apparence d'une grande cité d'abeilles (MAXIME DU CAMP, Le Nil, Egypte et Nubie,  1854, page 25 ). 

—  Cité + complément déterminatif. 

·    Cité de transit, d'urgence (pour loger provisoirement des personnes qui attendent un logement neuf en cours de construction). Confer Vocabulaire de l'administration (Agence de Coopération culturelle et technique) 1972. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 4 170. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 5 686, b) 8 541; XXe.  siècle : a) 5 392, b) 5 066. Cité-mère : 6. 

 

Forme dérivée du verbe \"citer\"

 citer

CITER, verbe transitif.  

I.—  Domaine du droit. 

A.—  Appeler quelqu'un par exploit d'huissier à se présenter comme défendeur ou comme témoin devant un juge de paix, un tribunal de police ou un tribunal correctionnel. Hennedyck arriva dans la salle du tribunal vers quatre heures. David l'avait fait citer comme témoin à décharge (MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14,  1935, page 486) : 

Ø 1. Entre-temps, j'avais comparu deux ou trois fois chez le juge d'instruction (...) qui n'avait aucun aveu à obtenir de moi (...) et me fit citer par le procureur du Roi en police correctionnelle

PAUL VERLAINE, Œuvres complètes, tome 4, Mes Prisons, 1893, page 384. 

Ø 2. Exploit d'huissier me citant à la justice de paix, vendredi, pour m'y « entendre condamner » à payer 25 francs à la salope et aux dépens. Coût 4 francs 45.

LÉON BLOY, Journal,  1903, page 191. 

Remarque : Les quasi-synonymes ajourner et assigner s'emploient pour une citation devant un tribunal de première instance. 

SYNTAXE : Citer en justice; citer à comparaître; citer quelqu'un en témoignage, en conciliation. 

—  Anciennement.  [Devant un tribunal ecclésiastique]  Il fut cité devant l'official; on le cita au concile (Dictionnaire de l'Académie Française) : 

Ø 3. Ainsi, nous vous enjoignons à tous et à chacun de vous, en particulier, par ces présentes lettres, de citer immédiatement et d'une manière définitive (...) devant nous ou devant l'official de notre église cathédrale, pour le lundi de la fête de l'Exaltation de la Sainte-Croix, le 19 septembre, Gilles, noble baron de Rais, soumis à notre puissance et relevant de notre juridiction, et nous le citons, nous-mêmes, par ces lettres, à comparaître à notre barre pour avoir à répondre des crimes qui pèsent sur lui. [Extrait du mandat d'arrêt prononcé contre Gilles de Ray par Jean de Malestroit, 1440] .

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Là-bas, tome 2, 1891, page 101. 

B.—  Par extension.  Faire venir en appelant Alban alla droit vers le taureau, le cita. Il fut un peu saisi quand la bête arriva sur lui (HENRI DE MONTHERLANT, Les Bestiaires,  1926, page 421 ). 

II.—  DIDACTIQUE.  et autres domaines. 

A.—  DIDACTIQUE.  Reproduire mot à mot, oralement ou par écrit, des paroles ou un texte empruntés à un auteur, pour éclairer, illustrer ou prouver ce qu'on dit. Citer un passage, des vers; citer la loi; citer de mémoire, textuellement, exactement. À propos d'une fleur, Julien cita quelques mots des Géorgiques de Virgile (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Le Rouge et le Noir,  1830, page 300) : 

Ø 4. Le Président prévit alors l'entière et inévitable subversion de la monarchie; je me rappelle à ce sujet un passage de Montaigne, qu'il me cita à l'appui de son opinion. « La majesté royale s'avale plus difficilement du sommet au milieu, qu'elle ne se précipite du milieu à fonds. »

GABRIEL SÉNAC DE MEILHAN, L'Émigré,  1797, page 1587. 

Ø 5.... je (...) t'accablais d'exemples pour te prouver que la sainteté consiste justement à suivre l'Évangile au pied de la lettre. Si tu avais le malheur de protester que tu n'étais pas une sainte, je te citais le précepte : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ».

FRANÇOIS MAURIAC, Le Noeud de vipères,  1932, page 113. 

SYNTAXE : Citer du latin, l'Évangile, le Coran, le Talmud, un proverbe, en épigraphe, à tout propos, volontiers, souvent, abondamment, pour mémoire, en entier, en preuve, à l'appui, en faveur d'une opinion; aimer à, se borner à citer. 

·    Ouvrage déjà cité. Dont on a déjà indiqué le titre. [Dans un livre, pour indiquer un ouvrage précédemment cité]  opere citato Abréviation du latin opere citato \" dans l'ouvrage cité \". 

·    Auteur cité. Dont on a déjà indiqué le nom. 

—  Par métonymie. Citer des écrivains. Citer des fragments de leurs écrits. Citer les Anciens. Ce sont les symétries du style de Sénèque qui le font citer (JOSEPH JOUBERT, Pensées tome 2, 1824, page 161) : 

Ø 6. Il m'assurait aussi qu'il fallait accepter ce que la vie a de quotidien et me citait Verlaine : « La vie humble, aux travaux ennuyeux et faciles ».

SIMONE DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, page 202. 

—  emploi absolu.  Faire des citations. Le plaisir, la manie de citer : 

Ø 7. Dans les lettres, dans la philosophie, dans la morale, l'examen ne s'était pas encore introduit; les textes étaient un pouvoir, et pour convaincre, il ne fallait que citer.

PROSPER DE BARANTE, Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois, tome 1, 1821-24, page 82. 

Ø 8. Ce que E. C. louait surtout, c'était mon style; il donnait un grand nombre d'exemples, et je ne sais s'il citait « de mémoire » ainsi que font Proust ou Maurras; mais toujours est-il que sur cette quantité de citations qu'il faisait, la plupart étaient inexactes.

ANDRÉ GIDE, Journal,  1934, page 1206. 

—   [En incise]  Je cite. Le visiteur illustre se baissa vers le jeune duc de Luynes, âgé de sept ans, et (je cite) le combla de gâteaux (STÉPHANE MALLARMÉ, La Dernière mode,  1874, page 786 ). 

B.—  Par analogie.  Rapporter, invoquer à titre de preuve. Citer un exemple, des faits. Synonymes : alléguer, rapporter, donner (en exemple). Il parle des gens de finance à éclipses dans les prisons, nous en citant un, sans le nommer (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1887, page 644) : 

Ø 9. Il n'hésita pas à dire à Phileas Fogg que si Mrs. Aouda restait dans l'Inde, elle retomberait inévitablement entre les mains de ses bourreaux. (...) Et Sir Francis Cromarty citait, à l'appui de ce dire, un fait de même nature qui s'était passé récemment.

JULES VERNE, Le Tour du monde en quatre-vingts jours,  1873, page 70. 

C.—  Indiquer avec précision, nommer. 

1. Désigner expressément, nommer. Citer des noms, des dates, des chiffres. Synonyme : mentionner. L'Empereur alors s'est enquis particulièrement de quelques-uns, en les citant [ses officiers] par leurs noms (EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 209 ). Ni l'un ni l'autre des deux compilateurs n'avait daigné citer la source où il avait puisé (ALFRED DE MUSSET, Le Temps,  1831, page 104 ). 

—  Locution familière. Citer son auteur, ses sources, ses références. Nommer la personne qui a donné un renseignement : 

Ø 10. À propos de vue, vous a-t-on dit que l'hôtel particulier que vient d'acheter madame Verdurin sera éclairé à l'électricité? Je ne le tiens pas de ma petite police particulière, mais d'une autre source : c'est l'électricien lui-même, Mildé, qui me l'a dit. Vous voyez que je cite mes auteurs!

MARCEL PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,  1918, page 607. 

—   [En parlant d'une suite d'objet]  Citer dans l'ordre, au hasard, en vrac. Synonyme : énumérer :  

Ø 11. —  (...) Voulez-vous me citer quelques verbes irréguliers, avec leur forme au présent et au participe passé?

—  To see, voir, I saw, seen. To be, être. I was, been. To drink, boire. I drank, drunk.

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine à l'école,  1900, page 234. 

2. Signaler à l'attention quelqu'un ou quelque chose de remarquable sous quelque aspect. 

—  Citer quelqu'un en exemple : 

Ø 12.... une des femmes que les deux faubourgs citaient pour sa beauté, son esprit et ses vertus.

PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 4, Les Exploits de Rocambole, 1859, page 278. 

Ø 13.... les créanciers la tourmentaient plus qu'autrefois, lorsqu'elle n'avait pas le sou; chose qui lui causait une continuelle surprise, car elle se citait comme un modèle d'économie.

ÉMILE ZOLA, Nana,  1880, page 1265. 

—  Citer quelque chose Citer un trait de courage. Magistrat intègre dont la vie irréprochable était citée dans toutes les cours de France (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Un Fou?, 1885, page 1010 ). 

—  Spécialement.  ARMÉE.  Citer à l'ordre du jour, de l'armée, du régiment, du bataillon, etc. Signaler par une nomination honorifique un militaire ou une unité qui a accompli un acte de courage ou de dévouement (confer citation). On parle de te citer à l'ordre du jour de l'armée pour ta conduite à Maubeuge (HENRI DE MONTHERLANT, L'Exil,  1929, I, 2, page 25) : 

Ø 14.... je cite à l'ordre de l'Empire le territoire du Tchad pour le motif suivant : « Sous l'impulsion de ses chefs, le gouverneur Éboué, gouverneur, et le colonel Marchand, commandant militaire du territoire, le Tchad a montré qu'il demeurait, par excellence, une terre de Français vaillants ».

CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre,  1954, page 289. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 4 311. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 6 472, b) 5 476; XXe.  siècle : a) 6 155, b) 5 938. 

DÉRIVÉS : 1.  Citable,  adjectif,  rare.  Qui peut être cité; qui mérite d'être cité. La Bible, en France, n'a jamais été le monument littéraire qu'elle est en Angleterre et en Allemagne. (...) elle n'est pas citable dans les traductions françaises. Quand un Anglais cite un verset des Écritures, il reproduit, avec un scrupuleux respect des mots et de l'ordre des mots, une traduction de génie (JULIEN GREEN, Journal, 1945, page 242 ). 2.  Citateur, -trice, citeur, -euse,  substantif.  Personne qui cite toujours, qui fait de nombreuses et fréquentes citations dans ses paroles ou dans ses écrits. Je ne lis pas un livre pour y trouver un citateur perpétuel, un arrangeur de textes (PAUL LÉAUTAUD, Le Théâtre de Maurice Boissard, tome 2, 1943, page 313 ). Il [Degas] avait beau être né en plein « Romantisme » (...), il n'en demeurait pas moins un de ces connaisseurs délicieux (...) impitoyables aux nouveautés qui ne sont que neuves, nourris de Racine et d'ancienne musique, citateurs et « classiques » jusqu'à la férocité, à l'extravagance, aux éclats, qui nous sont malheureusement une espèce disparue (PAUL VALÉRY, Degas, danse, dessin,  1936, page 41 ). 

 

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