Chrétien de Troyes et le roman médiéval

Chrétien de Troyes et le roman médiéval

Sans le Conte du Graal, tout un imaginaire serait resté dans les limbes. La véritable postérité littéraire de Chrétien de Troyes, c’est le rude roman de Perlesvaus au début du xmc siècle, c’est le grand cycle en prose du Lancelot-Graal et toutes ses adaptations étrangères, c’est aussi le Parsijal de Wagner et, de nos jours, la persistance du mythe chez Julien Gracq. Mais l’influence de Chrétien ne se limite pas à la seule mythologie du Graal, et l’on peut dire de lui qu’il est véritablement un des précurseurs du roman moderne.

Il l’est par son souci de la facture bien agencée, de la souveraine « conjointure », mais il l’est aussi par son sens de la psychologie fine et par la façon dont il investit, dans les monologues et dialogues, les méandres de l’affectivité. A cet égard, le Conte du Graal marque un autre tournant : le poète y est plus objectif, il note les gestes et les discours des personnages sans les découvrir de l’intérieur et sans révéler à l’auditoire les motivations intimes de leur comportement.