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Balzac, La Peau de Chagrin. Vous ferez de ce texte un commentaire composé organisé à votre guise ; vous pourrez, par exemple, mettre en lumière le pittoresque de la description et montrer comment le regard du jeune homme charge « cette singulière nature » d'images qui s'accordent à son âme.

Publié le 21/02/2011

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balzac

De sa mansarde, Raphaël, jeune homme studieux et solitaire, découvre le spectacle des toits d'un quartier misérable de Paris.

Si d'abord cette vue me parut monotone, j'y découvris bientôt de singulières beautés. Tantôt le soir des raies lumineuses, parties de volets mal fermés, nuançaient et animaient les noires profondeurs de ce pays original. Tantôt les lueurs pâles des réverbères projetaient d'en bas des reflets jaunâtres à travers le brouillard, et accusaient faiblement dans les rues les ondulations de ces toits pressés, océan de vagues immobiles. Enfin, parfois de rares figures apparaissaient au milieu de ce morne désert, parmi les fleurs de quelque jardin aérien, j'entrevoyais le profil anguleux et crochu d'une vieille femme arrosant des capucines, ou dans le cadre d'une lucarne pourrie quelque jeune fille faisant sa toilette, se croyant seule, et de qui je ne pouvait apercevoir que le beau front et les longs cheveux élevés en l'air par un joli bras blanc. J'admirais dans les gouttières quelques végétations éphémères, pauvres herbes bientôt emportées par un orage ! J'étudiais les mousses, leurs couleurs ravivées par la pluie, et qui sous le soleil se changeaient en un velours sec et brun à reflets capricieux. Enfin les poétiques et fugitifs effets du jour, les tristesses du brouillard, les soudains pétillements du soleil, le silence et les magies de la nuit, les mystères de l'aurore, les fumées de chaque cheminée, tous les accidents de cette singulière nature devenus familiers pour moi, me divertissaient. J'aimais ma prison, elle était volontaire. Ces savanes de Paris formées par des toits nivelés comme une plaine, mais qui couvraient des abîmes peuplés, allaient à mon âme et s'harmoniaient avec mes pensées.

Pendant une orgie, Raphaël raconte sa jeunesse à un ami. Avant de connaître la passion avec Foedora, il a mené une vie studieuse dans une mansarde du Quartier Latin, tout en écrivant un traité philosophique, une Théorie de la Volonté. On peut noter que Balzac a bien connu ce quartier, où il a vécu lui-même.

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