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Article de presse: L'affaire des diamants

Publié le 17/01/2022

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10 octobre 1979 - Dès le mois de septembre, le Monde daté du 21 avait publié un article d'Albert de Schonen, ambassadeur de France en Centrafrique de 1969 à 1971, qui faisait état de la pratique des cadeaux en vigueur à Bangui dont bénéficiaient les visiteurs officiels. Le 10 octobre, le Canard enchaîné publie le fac-similé d'une commande de Bokassa pour une plaquette de diamants de trente carats destinée à Giscard d'Estaing, alors ministre des finances. L'Elysée est interrogé sur l'authenticité de ces " révélations " par le Monde et plusieurs de ses confrères. En vain. Au terme du conseil des ministres qui siège le 10 octobre, dans la matinée, le porte-parole, Pierre Hunt, déclare, à ce sujet, que le conseil n'a évoqué que des " affaires sérieuses ". En fin d'après-midi, l'Agence France-Presse publie une dépêche ainsi rédigée : En réponse à une question concernant la pratique des cadeaux diplomatiques, on indique, à l'Elysée, que les échanges de cadeaux de caractère traditionnel, notamment lors des visites de membres du gouvernement dans les Etats étrangers, n'ont, en aucun cas, ni le caractère ni la valeur qui ont été mentionnés par certains organes de presse à propos du Centrafrique. Interrogé par les journalistes le 11 octobre, Pierre Hunt fait la " remarque personnelle " suivante : " Je ne crois pas qu'il soit très digne pour la fonction présidentielle d'avoir à se justifier ou à donner des répliques sur des informations qui relèvent davantage de la diffamation ou d'une campagne orchestrée que d'une campagne véritable ". Alors que dans son numéro du 17 octobre le Canard enchaîné revient sur l'affaire des diamants, le porte-parole de l'Elysée précise le même jour que " le président de la République fera justice de ce sujet le moment venu et dans des conditions qui répondront à la confiance que lui font les Français ". Georges Fillioud (PS) reproche au gouvernement, au cours du débat sur les crédits de la radio et de la télévision, le 26 octobre à l'Assemblée nationale, d'avoir étouffé l' " affaire des diamants ". Le 26 novembre, le Parti socialiste pose dix questions au président de la République, dont l'une porte sur sa mise en cause dans plusieurs affaires et l'autre sur ses relations avec le " tyran Bokassa ". Au cours d'un entretien télévisé, le 27 novembre, en réponse à des questions précises d'Alain Duhamel et Jean-Pierre Elkabbach, Valéry Giscard d'Estaing répond : " Avant que mon mandat ne s'achève, tous les cadeaux que j'ai reçus, et dont la liste sera conservée, auront été utilisés à l'une ou l'autre de ces fonctions, c'est-à-dire oeuvres de bienfaisance ou musées ". " Je ne vous cache pas qu'il est assez désobligeant pour moi de répondre à des questions de cette nature. Je peux vous dire que déjà, ces dernières années, de nombreux cadeaux ont été envoyés à des oeuvres de bienfaisance, qui le savent et qui, d'ailleurs, m'en envoient par écrit le témoignage, ou à des musées, où ils sont, à l'heure actuelle, présentés ". " Enfin, à la question que vous m'avez posée sur la valeur de ce que j'aurais reçu comme ministre des finances, j'oppose un démenti catégorique et, j'ajoute, méprisant ". Le 28 novembre, le Canard enchaîné publie une note de Bokassa du 11 juillet 1974 faisant état d'un nouveau cadeau de plusieurs plaquettes à Valéry Giscard d'Estaing, après son élection. Dans le Monde du 6 décembre, des " questions " sont posées à ce sujet dans un éditorial en première page. Le 17 décembre 1980, Bokassa confirme, dans un entretien téléphonique avec la rédaction du Canard enchaîné, les révélations faites par ce journal depuis un an. Le Monde du 26 décembre publie sous le titre Bokassa et la France, un éditorial signé de Jacques Fauvet où l'on peut lire notamment : " L'affaire des diamants, puisqu'il faut y revenir, même si elle n'a pas été évoquée au procès, se situe à plusieurs niveaux. Le moins important est celui des cadeaux, traditionnels en Afrique. Qu'ils soient conservés, vendus ou restitués importe peu. Ils ne sont qu'un signe, celui d'une certaine politique fondée sur des relations personnelles. Le second niveau est précisément celui d'un type de relations avec un pays dont nul n'ignorait la situation, avec un homme dont, s'ils faisaient leur métier, les ambassadeurs n'ignoraient ni les moeurs, ni les crimes, ni... la générosité. Le dernier niveau est la manière dont, depuis plus d'un an, on a voulu effacer les traces de ces relations et de cette politique. Du déménagement précipité du palais de Berengo à l'affaire des scellés de Delpey, les maladresses se sont multipliées, au point que la presse anglo-saxonne ne parle plus que d'un possible Watergate. S'il y en a un, il est là et pas ailleurs. Qu'a-t-on gagné à ce jour à travestir ou à taire la réalité ? " Le 27 janvier 1981, à l'émission " Une heure avec le président de la République ", Valéry Giscard d'Estaing est interrogé sur ses liens avec certains chefs d'Etat, notamment l'ex-empereur Bokassa. Il répond, sèchement : " Je vous en prie. Cette émission a une certaine tenue. Nous n'allons pas entrer dans cette considération. Il n'y a d'autres relations que celles qu'entretiennent entre eux les chefs d'Etat. Il n'y a aucun lien d'ordre personnel ". Le Monde du 12 mars 1981

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